Page 61 - Rebelle-Santé n° 236
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     Rebelle-Santé :
Comment en êtes-vous venue à la pratique du massage Ku Nyé ?
Véronique Lemée :
J’ai découvert la médecine tibétaine et ses thérapies externes par le biais du bouddhisme. Dans le boud- dhisme tibétain, il existe un Bouddha de médecine, Sangyé Menla, qui est notamment à l’origine des quatre Tantras de médecine, le Gyu Shi. Ce traité en 4 volumes enseigne le système médical tibétain sous la forme d’un dialogue entre deux sages.
À cette époque, j’exerçais déjà dans le soin manuel et cette approche holistique de la santé m’a ouvert un nouvel espace de compréhensions et d’applica- tions. J’ai alors suivi un cursus complet en France pendant 5 ans à l’école internationale de médecine tibétaine (1) fondée par le Dr Nida Chenagtsang. J’ai également fait plusieurs voyages à Dharamsala, ville d’exil des Tibétains, où réside le Dalaï Lama et où est installé le Men-Tsee-Khang, l’institut universitaire de référence en médecine tibétaine. J’ai ainsi intégré à ma pratique l’art médical tibétain et ses thérapies externes, dont le Ku Nyé.
En quoi consiste exactement le massage Ku Nyé ? Et que signifie le terme "Ku Nyé" ?
Le Ku Nyé est un massage à l’huile chaude, qui com- porte plusieurs phases.
Phase 1. "Ku" signifie littéralement "appliquer" ou "oindre" le corps.
Il s’agit d’une application d’huile chaude par frotte- ment en surface (chug pa), suivie de mobilisations arti- culaires (tsig jor) et d’une application de compresses (srowa) chaudes (des pierres chaudes, par ex.) L’objec- tif est de réchauffer le corps, en insistant sur les articu- lations, car elles sont froides par nature.
Phase 2. "Nye" signifie "assouplir la peau", " tanner". Cette phase constitue le massage en lui-même. Il comprend un travail sur les muscles (sha), les points (sang) et les canaux énergétiques (tsa). Tous les tissus du corps sont mobilisés afin de libérer les tensions musculaires, fasciales, tendineuses, et de favoriser la circulation énergétique.
Phase 3 : "Chi" signifie "retirer".
Le praticien retire l’huile restante avec une technique choisie en fonction de la constitution de la personne. Cela peut se faire avec de la farine de pois chiche (comme un peeling doux), en retirant l’huile en excès avec un gant humide ou encore par un bain ou une douche.
Quelle est l’histoire du massage Ku Nyé et sa place dans la médecine traditionnelle tibétaine ?
Pour saisir la portée thérapeutique du Ku Nyé, il est nécessaire de comprendre le fonctionnement général de la médecine tibétaine.
Son nom tibétain, SOWA RIGPA, peut être traduit de 2 manières : science de la guérison ou nourriture de la conscience.
Concernant le volet médical, la médecine tibétaine considère que nous sommes tous constitués des 5 élé- ments présents sur terre : l’espace, l’air/le vent, le feu, l’eau et la terre. Ces éléments, interdépendants et in- terconnectés, sont présents autour de nous et à l’inté- rieur de nous. La notion d’interdépendance, tendrel, est au cœur du système de pensée tibétain. Tout est relié dans la compréhension du monde chez les Tibé- tains et c’est aussi le fondement de leur vision holis- tique du soin.
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ALTERNATIVE
 Photos p 61 © Yakobchuk Olena - Adobe Stock
















































































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