Page 36 - Rebelle-Santé n° 226
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 SOCIÉTÉ
 • POUR EN SAVOIR PLUS SUR LES BIAIS COGNITIFS :
Système 1 / Système 2 : Les deux vitesses de la pensée (Thinking, Fast and Slow), Daniel Kahneman - 2012 - Éditions Flammarion - 560 pages - 24,99 € (version numé- rique 14,99 €).
Dans cet ouvrage de référence, le prix Nobel d’Économie Daniel Kahneman (2002) offre une synthèse de sa carrière et notamment toutes ses recherches avec Amos Tversky sur les biais cognitifs.
Pour les ados :
Crédulité & Rumeurs, Gérald Bronner et Jean-Paul Krassinsky - Le Lombard - 72 pages - 10 € (version numérique 4,99 €).
À la manière d’un Que sais-je en BD, le sociologue Gérald Bronner et le dessinateur Jean-Paul Krassinsky projettent les questionnements sur les biais cognitifs dans le cerveau d’un ado.
• QUOI DANS MON ASSIETTE ?
https://quoidansmonassiette.fr
Le blog de Thibault Fiolet est complètement bénévole.
N’hésitez pas à le consulter et à le soutenir à travers Tipeee. https://fr.tipeee.com/quoidansmonassiette
     Sentez-vous une défiance vis-à-vis des chercheurs ?
C’est certain. Malheureusement, on assimile la recherche publique au gouvernement, or il est nécessaire de distinguer l’évaluation des risques qui appartient aux scientifiques de la gestion qui revient aux politiques. Les politiques s’appuient ensuite sur ces expertises pour prendre des décisions qui prennent en compte d’autres facteurs conjoncturels socio-économiques ou culturels. Dans les faits, il existe un dialogue permanent entre les scientifiques et la politique, de même qu’il y a du lobbying. La méthodologie, qui prévoit cette séparation entre l'expertise scientifique et politique, oblige à la déclaration de conflits d’intérêts, ce qui devrait garantir en principe l’indépendance des scientifiques qui font ces études, à partir desquelles ils proposent des mesures de réglementation. Mais toutes les recommandations des scientifiques ne sont pas non plus toujours suivies par les politiques.
Qu’est-ce qui permet d’établir une connaissance scientifique ?
Les connaissances scientifiques ne sont pas figées, elles évoluent au cours du temps en fonction de la recherche et des nouvelles découvertes. Une seule étude ne démontre pas forcément quelque chose, c’est plutôt un faisceau de preuves qui permet- tra de conclure sur une hypothèse. Je crois que les
meilleures expertises sont collectives, car l’expertise doit prendre en compte l’ensemble des publications surunsujet,confronterlespointsdevuedivergents, et analyser les différents biais et limites méthodolo- giques. C’est le propre de la démarche scientifique.
Commentvulgariserlesdébatsd’experts?
C’est le plus difficile. J’essaye le plus possible de me mettre à la place de quelqu’un qui n’a aucune notion scientifique, en faisant des détours vers les fondamen- taux, comme la composition de l’atome pour mon- trer l’action des antioxydants sur les cellules. Ensuite, lesschémasetlesimagessontlesmeilleursoutilsde vulgarisation, de même qu’ils servent à manipuler facilement l’opinion. Ainsi, j’ai également écrit un article sur le pouvoir de ces représentations visuelles des données et les manières de lire les graphismes. Tout cela fait partie de ma démarche de décryptage. J’espère accompagner le développement de l’esprit critique de mes lecteurs. Depuis le début de l’an- née, j’ai commencé des vidéos, en format court, qui m’obligent à synthétiser encore davantage. Je fais des petits topos de 4 à 10 minutes, sur des sujets précis autour de l’alimentation ou en écho des débats de l’actualité. Je suis convaincu de la nécessité d’offrir aux gens les clés pour comprendre les études scienti- fiques et les débats d’experts.
Propos recueillis par Lucie Servin
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