Page 37 - Rebelle-Santé n° 226
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URGENCES
Dr Daniel Gloaguen
UN GROS ORTEIL DOULOUREUX APRÈS UN TRAUMATISME ?
ET SI C’ÉTAIT UNE FRACTURE DES OS SÉSAMOÏDES ?
Une douleur sous l’articulation du gros orteil à la marche ? Il s’agit peut-être d’une fracture des os sésamoïdes du gros orteil, une pathologie encore trop insuffisamment diagnostiquée.
Une fracture des os sésa- moïdes du gros orteil non diagnostiquée a peut-être
malheureusement coûté sa carrière prometteuse à un jeune espoir du football français en 2015*. En cause, des chocs répétés sous le gros orteil lors de la course à pied certes, mais aussi peut-être la mé- connaissance de cette pathologie plutôt rare. Il faut donc y penser dès lors que survient une douleur plan- taire sous l’articulation du gros or- teil, autrement dit au niveau de l’ar- ticulation métatarso-phalangienne.
MÉTATARSALGIE
Toute métatarsalgie (douleur d’un métatarse) sans origine évidente comme une fracture du premier métatarse, de la première pha- lange ou sans lésion cutanée ou tendineuse, devrait faire évoquer de principe une lésion des os sésa- moïdes, a fortiori lorsque la dou- leur s’accompagne d’une tuméfac- tion ou d’une inflammation. L’autre signe assez évocateur est une dou- leur sous l’articulation lorsqu’on fléchit l’orteil vers le haut, une po- sition qui met en tension les tissus mous sous l’orteil, à l’origine d’une compression des os.
UN PETIT PEU D’ANATOMIE
Difficile de parler de cette fracture sans aborder l’anatomie du gros orteil. Les os sésamoïdes, que l’on peut retrouver dans d’autres zones anatomiques (main, rotule...), cor- respondent à des petites forma- tions osseuses à peine plus grandes qu’un grain de riz. Plus que des os, ce sont des vestiges ligamentaires. Au niveau du gros orteil, ils sont situés sous la tête du métatarse du gros orteil, avant la naissance de la première phalange. De ce fait, ils sont très exposés aux chocs liés à la marche, à la course et aux chutes en contrebas avec atterris- sage sur le pied.
DU DIAGNOSTIC...
À défaut d’une radiographie, pour laquelle les lésions peuvent être difficiles à interpréter, le dia- gnostic comporte plus souvent un examen d’imagerie (IRM, scin- tigraphie) qui montre l’atteinte : fracture, écrasement, déplace- ment, luxation, ostéonécrose, éro- sion, ostéophytes (becs de per- roquet), déminéralisation. Enfin, dans certains cas, les douleurs peuvent être liées à une véritable algodystrophie de ces os.
... AU TRAITEMENT
Le traitement comporte la mise au repos de l’articulation pendant au moins 4 à 6 semaines. Le port de chaussures adaptées à semelle épaisse et correctement serrées est important, de même que l’utilisa- tion d’orthèses. Dans certains cas, il est recommandé d’immobiliser l’articulation (chaussure chirurgi- cale).
Sinon, il faudra recourir à l’électro- thérapie (ultrasons, laser), aux in- jections diverses (corticoïdes, AINS, anesthésiques locaux...). Ce n’est qu’en cas d’échec des différents traitements que peut être envisagée une intervention chirurgicale. En moyenne, 90 % des blessés retour- neront à leur sport après le traite- ment dans un délai de 4 semaines à 6 mois.
Dr Daniel Gloaguen
FACTEURS DE RISQUES
• Sports en charge (danse, gymnastique, course à pied, badminton...)
• Chaussures inadaptées
• Chute
• Port de talons hauts
• Pieds cambrés ou arqués
• Hallux valgus
• Oignons.
PIÈGES DIAGNOSTIQUES
• Arthrite
• Arthrose
• Hyperkératose (verrue, cal...) • Goutte.
*Yoann Gourcuff
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