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MÉDECINE D'HIER ET D'AUJOURD'HUI
des plantes à curare rapportées d'Amazonie en 1938, est introduit en anesthésie. Les curares repré- sentent une des grandes révolu- tions de l’anesthésie du XXe siècle.
Aujourd’hui, alors que les risques de complications liées à l’anesthé- sie ont considérablement chuté, les allergies aux curares restent toute- fois responsables à plus de 60 % des accidents de l’anesthésie.
La création d’une discipline médicale
Après la Seconde Guerre mon- diale, l'anesthésie devient une discipline médicale autonome, à laquelle est adjointe la réanima- tion. Cette professionnalisation a permis d’améliorer la sécurité par le développement d’un suivi et d’un meilleur encadrement des pratiques, allant de la consulta- tion au bloc opératoire et à la salle de réveil.
La découverte du GHB, par le professeur Henri Laborit en 1961, ouvre la voie aux molécules com- plexes et de plus en plus respec- tueuses de la physiologie. Les
anesthésies, de moins en moins toxiques, se prolongent, ce qui ouvre le champ à de nouvelles opérations. En France, les patients traités dans le cadre des anesthé- sies générales doivent être surveil- lés en permanence afin d'assurer leur sécurité, selon les cas, par un anesthésiste ou un infirmier anes- thésiste.
L’arrêt Roche, en 1973, attribue pour la première fois une respon- sabilité distincte entre le chirur- gien et l’anesthésiste, malgré la complémentarité des disciplines médicales.
En France, 9 millions d'anesthé- sies générales sont pratiquées chaque année. Une étude en 2006 a montré que la mortalité liée à l'anesthésie générale a été divisée par dix en vingt ans avec un taux actuel de mortalité de 0,69 morts pour 100 000 anesthé- sies, ce taux variant de 0,4 pour 100 000, dans le cas de patients bien portants, à 55 pour 100 000 pour ceux porteurs des patholo- gies les plus graves, car on opère également des patients toujours plus fragiles. (1)
et demain...
Tributaire de la médecine molécu- laire, le ralentissement de la créa- tion de nouvelles molécules ne li- mite pourtant pas les perspectives de recherches en anesthésie qui doit toujours optimiser et mieux comprendre la posologie et les effets de toute la palette de pro- duits dont elle dispose déjà. De plus, engagée auprès des neuros- ciences, l’anesthésie prolonge son projet clinique et philosophique toujours « fou » de maîtriser la conscience, en imaginant de nou- velles gammes de neuromédia- teurs pour l’avenir.
Lucie Servin
Cet article s’appuie sur les données du CHAR (Club d’histoire de l’anesthésie et de la réanimation), www.char-fr.net.
(1) Résultats d’une enquête conjointe de la Société française d'anesthésie-réanimation (SFAR) et de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) publiés en 2006 dans la revue Anesthesiology.
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