Page 39 - L'AVENTURE DE JABER
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L’Aventure de Jaber
Pendant que le conteur parle, on place des pièces du décor représentant le diwan du vizir. Une salle garnie d’un mobilier luxueux. On voit dans le diwan le vizir avec son ami Abdellatif, l’un des émirs de Bagdad, de ceux qui détiennent richesse et grand pouvoir. Le vizir a dépassé la quarantaine : il est gros, son visage reflète la bassesse ; il a les traits crispés et le regard plein de haine. Il semble très ému. Il s’assoit un instant puis se lève nerveusement et commence à faire le tour de la salle. D’un geste inconscient, il avance sa lèvre inférieure, saisit un poil de sa moustache, le mordille puis il crache. De temps à autre, il tire de son gilet une tabatière ; avec ses deux doigts, il en prend un peu, le fourre dans ses narines et éternue. Nous le voyons faire ce geste au moins deux fois avant que le garde se présente à lui. Abdellatif est aussi nerveux que le vizir mais il essaie de se tenir tranquille sur son siège.
Le garde entre et s’approche du vizir.
LE GARDE. - Maitre ! Il y a, à votre porte, un de vos mamelouks qui désire être reçu.
LE VIZIR. - Que veut-il ?
LE GARDE. - Il n’a pas dévoilé l’objet de sa visite mais il insiste pour vous rencontrer en tête à tête.
LE VIZIR, d’un geste ennuyé. - Fais-le attendre ! LE GARDE. - J’écoute et j’obéis.
Il se retire du diwan.
LE VIZIR, tournant en rond et se mordant la moustache. - Et maintenant... ABDELLATIF. - Admettons qu’ils ont marqué un point, personne n’a imaginé qu’al-Moqtader allait réagir aussi vite.
LE VIZIR, avec véhémence. - Quant à moi, eh bien ! je l’avais prédit. Depuis peu, les mouvements de son frère Abdallah se multipliaient et s’intensifiaient. C’est lui le cerveau qui trame tout : contacts avec les grands commerçants, lettres envoyées aux provinces, réunions secrètes avec le calife. (Sa voix se transforme en cri.) Il fallait nous attendre à un méchant coup sur nos têtes.
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