Page 5 - Miettes
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Je sais que son enthousiasme n’était pas partagé par mon père.
               A mon sujet en outre. Il se prévalait de ne pas vouloir d’enfant. Il
               mettait en avant de sa blessure avec sa précédente compagne,
               qui lui avait imposé une paternité non désirée.

               Mon père, contrairement à ma mère, on ne lui impose rien. Donc
               il était parti sur le fait, et cette sœur que j’ai quelque part, dont je
               partage le sang, je ne la connais pas. Et je n’en saurai rien du
               reste. C’est comme ça dira-t-il. Du fait, il prétend lui-même ne pas
               savoir  qui  elle  est,  ne  l’avoir  jamais  rencontrée,  n’avoir  jamais
               cherché à la voir. Parce que « ce n’est pas sa fille ».

               Je sais que je n’étais pas désirée de lui. Je le comprends un peu.
               Il n’a pas lui-même pu connaitre son père, et n’en tire même pas
               l’héritage de son nom de famille. Ce qu’il regrette amèrement et
               reproche à sa mère. Comment a-t-elle pu laisser son beau-père le
               « reconnaître »  et  lui  flanquer  ce  nom  de  famille  qu’il  vomit
               aujourd’hui. Ses relations avec cet homme n’étaient pas apaisées.
               Mais  cela  encore,  je  n’en  saurai  rien  de  plus.  Papa  disait  « je
               m’appelle  Personne ».  Il  est  évident  que  sa  crise  identitaire
               persistait derrière l’apparent humour sombre sur le propos.

               Toujours est-il qu’il a toutefois accédé à la tendresse de maman
               dans son désir d’enfant. Il semble que les valeurs familiales qu’elle
               porte  l’auront  convaincu.  Mais  il  était  ferme  sur  un  point.  Son
               enfant  à  venir  ne  l’appellera  pas  « papa ».  Ce  mot  lui  faisait
               horreur. Il avait ce côté un peu rustre. Mais je crois que maman
               avait  fini  par  l’apprivoiser.  Après  tout  je  suis  bien  là  pour  en
               témoigner. Mais il ne fallait pas compter sur lui pour s’apitoyer non
               plus.

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