Page 139 - La pratique spirituelle
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On croit que le corps est détendu, car la posture intérieure Avant que l’avalanche ne se déclenche, il y a des signes pré-
est globale et détachée. Mais des tensions perdurent, comme curseurs. Ce sont eux qui doivent être vus au plus tôt.
des automatismes résiduels. Il convient donc de les identifier,
les accueillir et en permettre leur résorption dans le silence de Même lorsqu’on est témoin de l’agitation du mental, l’identifi-
l’écoute. Sinon, aussi propre que soit votre maison, si les pla- cation semble pouvoir encore se maintenir.
cards n’ont pas été ouverts et nettoyés, ils continueront à amas- La roue qui tourne continue aussi à tourner, jusqu’à l’épui-
ser la saleté. Vous pouvez bien sûr ignorer ces placards et les sement complet de son énergie cinétique, et ce bien qu’aucune
considérer comme faisant partie du rêve de la manifestation. impulsion ne lui est plus envoyée. Il en est de même avec les
Mais vous devez alors pleinement accepter qu’ils continuent à processus projectifs et réactifs. Il convient aussi d’inclure le
s’exprimer à travers votre corps. corps dans votre écoute, et non seulement le mental. Les ten-
sions corporelles accumulées au fil du temps sont un réservoir
Est-ce que cette détente totale, globale, est comme quasi inépuisable. Par le souffle et l’écoute, elles finissent par
« contagieuse » ? se dissoudre.
Oui, absolument. L’être humain fonctionne en partie par
mimétisme. La posture est donc contagieuse. Comment demeurer détendu, et pourtant éveillé, attentif, vigi-
lant ? N’y a-t-il pas comme une sorte de tension dans l’attention ?
La contagion se fait-elle aussi pour la posture malade ? Pour mettre le pied dans une chaussure, un certain effort
Oui, lorsque vous faites face à quelqu’un qui est enfermé est nécessaire. Une fois que le pied et la chaussure sont un, il
dans sa posture égotique habituelle, cela peut réveiller la vôtre, n’y a plus trace d’effort. Il en est de même avec l’attention. Un
si elle n’est pas complètement éteinte. effort d’attention est nécessaire, tant que perdure l’identifica-
tion au contenu des projections. Ce qui perçoit cet effort est en
Peut-on « guérir à la place de l’autre » par empathie ? dehors de l’effort. Ne restez pas fixé sur le perçu, mais tournez
L’être qui se sait être ne nourrit plus la perspective égotique. le regard vers ce qui perçoit. L’effort disparaîtra de lui-même,
Elle peut perdurer dans son entourage par habitude, mais ne en temps voulu.
sera plus stimulée. Et un réflexe qui n’est plus stimulé s’éteint
de lui-même. Peut-on se placer sciemment dans l’arrière-plan, selon la for-
mule magique « je ne suis pas un objet, je suis ce qui contient
* tous les objets », ou « je ne suis pas ce que je perçois, je suis ce qui
* * contient/accueille toute perception » ? N’est-ce pas, dans ce cas,
Il me semblait que, lorsque la pensée qui déclenchait l’émotion le petit moi qui tire sur la languette de ses bottes pour s’élever ?
était vue à temps, sa charge émotive pouvait être désamorcée. Vous êtes déjà dans l’arrière-plan. Comment pourrait-il en
Dans le cas d’émotions fortes, cela ne semble pas être toujours être autrement ? Croire que vous n’y êtes pas est une croyance
le cas. erronée. La phrase qui agit comme un mantra ne fait que vous
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