Page 73 - La pratique spirituelle

comparaison, il y a attention. Et cette attention est la source Prenez note de cette réticence. Ne cherchez pas à la chan-
même de la joie et de la plénitude. Ne les cherchez donc pas ger. Contentez-vous de la constater. Le constat n’est pas juge-
là où elles ne se trouvent pas. Elles attendent votre abandon, ment. Il est vision.
afin de se révéler.
Accepter votre moi tel qu’il est ne veut pas dire qu’il ne Deux choix se présentent à moi. Premier choix : laisser l’inhi-
va pas changer. Il est une expression temporaire de la réalité bition faire son travail. On peut toujours observer en tant que
de votre être. Il n’a pas de structure fixe, apparaissant avec témoin, mais on participe consciemment à la protection de l’ego
le mental et disparaissant avec lui. Laissez tranquille votre et sa consolidation.
expression manifestée. Elle se prendra ainsi en charge par elle- Non, voir n’encourage pas ce qui est vu. Il est regard déta-
même. Acceptez la peur et l’inhibition, car les refuser ne fait ché sur la manière dont les phénomènes prennent forme. Ce
que les stimuler. Ce n’est pas vous qui pouvez quitter la peur. regard est sans préférence. Il ne préfère pas un scénario à un
Ce n’est que la peur qui peut vous quitter. Et elle vous quitte autre.
lorsque meurt l’anticipation, l’habitude de vivre dans un futur
projeté. Dans cet instant, il n’y a pas de souffrance, pas de Second choix : parler spontanément en « lâchant » la vérité sur
conflit. Présence pure. Attention. L’amour est là. Il n’appar- mon histoire personnelle, et ainsi de l’assumer extérieurement.
tient ni au moi, ni à l’autre. Il est éternel et intemporel. C’est Cela veut dire être naturel, spontané, avoir un rapport direct
en lui que vous vous épanouissez, dans la réalité de ce que dans la limite du possible.
vous êtes, et non de ce que vous devriez être. Si l’expression se fait ainsi, c’est parfait. Si l’expression ne
se fait pas ainsi, c’est parfait aussi. Dans tous les cas, l’expres-
Mon problème n’est pas tant par rapport au fait de m’accepter sion ou la non-expression sont conditionnées. Ce n’est pas en
moi-même pour moi-même. Ma question concerne le rapport elles que repose le bonheur désiré. Vous êtes le bonheur que
aux autres : dois-je exprimer, dévoiler, livrer en pâture, aux vous cherchez, la lumière qui éclaire les apparentes contradic-
autres ce que je suis ? tions. Pour la lumière qui éclaire, il n’y a pas de contradiction.
Il n’y a pas de choix. Ce qui émerge de votre être manifesté Elle est ce qu’elle est, quel que soit le spectacle qui se déroule
tient compte de la totalité de ce qu’il est, ainsi que de la tota- en elle.
lité de ce qui est perçu. Acceptez totalement ce qui s’exprime,
dans l’instant, ou ce qui ne s’exprime pas. Dans cette accepta- J’ai remarqué qu’avoir un jardin secret trop grand, qui corres-
tion, il y a liberté, tranquillité. pond à autant de choses non assumées extérieurement, aux inhi-
bitions, rend impossible toute relation intime et prolongée. Cela
Par exemple, si au cours d’une discussion quelque chose me contribue à donner beaucoup de pouvoir aux peurs et pollue les
gêne, je vais éviter de me livrer, de trop participer à la discus- relations aux autres.
sion. Cela correspond à une fuite, ou plutôt à une résistance au L’expression est conditionnée par l’écoute. S’il n’y a pas
niveau intérieur. d’espace d’écoute, parler n’est que prêcher. Vous ne parlez pas

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