Page 22 - Daily Rock #129
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CHRONIQUES
                                                                      BUSH                          basse vicieuse font souvent la
                                Le disque du mois
                                                                      The Kingdom                   paire pour tout emporter sur
                                                                                                    leur passage ('Bullet Hole'),
                                                                      BMG                           quand ils ne plongent pas
                                                                                                    dans un magma sombre et
                                                                                                    visqueux ('Flower on a Grave'),
                                                                                                    voire osent être autant sur la
                                                                                                    retenue que sournois ('Our
                                                                                                    Time Will Come'). Et hormis
                                                                                                    une accalmie en cours de route
                                                                                                    avec un 'Undone' qui parvient
                                         Depuis sa reformation en      pensait découvrir en 'The    même à éviter le piège de la
                                         2010 on avait clairement      Kingdom' une huitième œuvre   ritournelle douce, l’ensemble
                                         l’impression que Bush avait   parfaitement fastidieuse.    est grinçant et possédé. OK tout
                                         adopté les traits de l’oiseau-  Raté, voilà que c’est au tour du   n’est pas parfait, avec un 'Slave'
                                         lyre. Pas pour la forme       plumitif que je suis de jouer   recopiant presque les attaques
                                         d’instrument de l’appendice   les oiseaux de mauvais augure.   ébouriffantes du titre éponyme
                                         caudal de l’oiseau, mais      D’abord parce que Gavin      'The Kingdom', ou 'Send in the
                                         bien pour sa faculté à imiter   Rossdale a oublié que son   Clowns' qui tente de revisiter
                                         les sons. Et dans le cas des   chant peut être pleurnichard   les ambiances claires-obscures
                                         Londoniens, à imiter celui du   et parce que Chris Taylor a   des belles heures du groupe
                                         Bush des années nonante.      aussi compris que ce n’est pas   mais n’en saisit pas la tension.
                                         Reproduisant ses riffs grands   juste en faisant hurler la disto   Néanmoins Bush a retrouvé
                                         espaces, copiant ses accents   des guitares que l’on va sonner   sa splendeur et prend un
                                         alternatifs, singeant les     rock. Et surtout parce qu’avec   nouvel envol, avouons-le, aussi
                                         mélodies en forme d’accroche-  Nik Hughes, le nouveau batteur,   inattendu que bienvenu.  [YP]
                                         cœur. Problème, là où le volatile   et Tyler Bates à la production   bushofficial.com
                                         des terres australes se doit   (à ses heures guitariste de
                                         d’utiliser le plagiat pour plaire   Marilyn Manson), un vent de
                                         à sa belle, le rock s’est rarement   folie souffle sur la musique
                                         bonifié par le pastiche, et l’on   de Bush. Riffs passionnés et
























                                           BLUES PILLS
                                            Holy Moly                                                       JAYE JAYLE
                                           Nuclear Blast                                                      Prisyn
                                                                                                           Sargent House
           C’est une journée choisie pour parler du nouvel album de Blues Pills 'Holy Moly' ! En ce 14 juin 2020,
           moment de célébration des luttes féministes en Suisse, j’écris une review sur un album de onze
           pistes ouvrant la danse sur une chanson : 'Proud Woman'. Le décor est posé. Pour celles et ceux qui ne   Rares sont les artistes qui nous attirent du
           connaissent pas ce groupe suédois de blues rock psychédélique aux larges influences sixties, Blues   premier coup. . Charisme, ténèbres organiques,
           Pills envoie depuis 2012 une salve de distorsions aériennes sur ses fans. La bande s’est créée autour de   le quatuor américain nous a surpris en
           la charismatique chanteuse à la voix si puissante Elin Larsson et le guitariste Zack Anderson (ancien   première partie de groupes, de par son côté
           membre de Radio Moscow). Depuis, ils ont sillonné les scènes les plus mythiques d’Europe. 'Holy   country-sombre magnétique dont les morceaux
           Moly' reste dans la veine de ce qu’offre le groupe depuis ses débuts. Deux titres de l’album retiennent   oscillent entre Mark Lanegan et King Dude
           mon attention : 'Rythm in the Blues' et 'Dust'. La première pour sa pêche et son tonus, ainsi que son   et qui pourrait se retrouver autant dans
           introduction des plus étranges. La deuxième plonge le mélomane dans une imagerie de Western, de   une crypte que dans une bande-son de film
           sable et de verres malpropres. La lumière péclote, et les ombres s’étirent sur la table de billard. En   indépendant. Avec 'Prisyn', on part dans des
           écoutant cette petite partie de film musical, j’ai presque pensé à la bande-son d’un Tarantino. C’est vous   titres organiques, dont on entend la respiration
           dire la puissance évocatrice qui s’en dégage. On continue le périple musical dans les années soixante   et l'âme animale tout au long des dix titres.
           avec la fin de l’album, qui va osciller entre douceurs psychédéliques et entrainements rythmiques.  Quelques perles comme 'The River Sprees' et 'I
           Histoire de terminer sur quelques notes plus pessimistes : une sensation étrange à l’écoute, comme   Need You' méritent une attention particulière
           s’il y avait un manque d’énergie là où elle est le plus nécessaire. Cela est peut-être lié à une autre   pour tous les amateurs de film noir et de cigares
           observation : la guitare lead ne ressort pas assez dans le mix. Mais c’est probablement une remarque de   cubains fumés jusqu'à l'aube. [LN]
           guitariste frustré. [PG]                                                             www.sargenthouse.com/JayeJayle
            www.bluespills.com
       22   DAILY ROCK • #129 • ÉTÉ 2020
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