Page 36 - MOBILITES MAGAZINE n°16
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                 Politiques & institutions
    FERROVIAIRE / Réforme
Ruralité et transport ferroviaire
Le rapport Spinetta s’est trouvé désavoué au plus haut niveau de l’Etat en matière de suppression des « petites lignes », alors que diverses opinions et postures politiques à l’appui, on inclut la défense
de ces lignes avec celle de la « ruralité », au sens large du terme. Pourtant, leurs fonctions sont bien plus larges et plus variées.
 Essai de décryptage.
 Il faudrait donc défendre les « pe- tites lignes » TER aussi bien au nom de la décentralisation que
de la « ruralité » ! Après un rapport Spinetta qui est apparu à tous comme un véritable modèle de froide technocratie(1), les pendules ont été, au moins officiellement, et très rapidement, quelque peu remises à l’heure. Quand le Premier ministre, puis le Chef de l’Etat lui- même ont affirmé successivement qu’ « on ne ferme pas 9000 km de lignes depuis Paris », et « qu’il faut peut être en ouvrir d’autres pour recréer de la mobilité [...] les petites lignes servent à cela [...] on pourra maintenir toutes celles qui font sens et peut-être en créer d’autres » !
L’opposition, comme les élus ré- gionaux - ces derniers tous vent debout et toutes obédiences poli- tiques confondues - s’érigent en défenseur de ces mêmes lignes au nom de la « ruralité » à droite, et de la défense du « service pu- blic » à gauche. Il convient de noter que le passage entre les deux argumentaires - voire leur synthèse - est ici une posture po- litique très partagée.
Une notion complexe
Pourtant, cette focalisation du dé- bat sur la « ruralité » supposée de certaines lignes TER serait-elle fi- nalement hors réalité ferroviaire ? Voire même... hors sol ? Ce qui serait un comble, si l’on se réfère
NUne X 73 500 sur Carcassonne- Quillan.
aux sources du terme lui-même. Mais la fonction de ces soi-disant « petites lignes », tout comme la notion de « ruralité », se révèle bien plus complexe qu’elle ne l’était il y a plus d’un siècle dans une France alors majoritairement et réellement rurale. Elle était aussi quadrillée d’un tissu serré de petites lignes dites d’intérêt local.
C’est ce que démontrent de nom- breuses études de spécialistes, mais aussi des travaux parlemen- taires. Les seconds ayant même souvent - et paradoxalement - la tendance à infirmer le vocabulaire politique en vogue qui gravite au- tour de la ruralité et de la défense des lignes « rurales ». Défense assez récente d’ailleurs, alors qu’un rapport du Sénat consacré au Nou- vel espace rural français, publié en 2008 insistait sur l’importance de la dynamique des services dans les secteurs ruraux. Il constatait « qu’un socle de services publics de base est nécessaire pour main- tenir une population sur un terri- toire [et que] le développement des moyens de transports et de communication en est la première condition ». Toutefois, il n’évoquait absolument pas le rôle du mode ferroviaire dans son (très court) chapitre consacré aux transports. Puisqu’il se contentait de prendre simplement acte de la part hégé-
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