Page 17 - MOBILITES MAGAZINE N°15
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                         pas forcément une simplification, puisqu’elle peut mener à une si- tuation plus complexe de gestion des personnels. Déjà 8 à 10% des employés de la SNCF sont des contractuels hors statut, et la non- embauche au statut mènera donc à la coexistence de trois contrats de travail différents dans l’entre- prise. Cheminots au statut, ceux
déjà hors-statut plus nouveaux embauchés au contrat à définir qui devra intégrer les contraintes par- ticulières des métiers du rail. avec l’ouverture à la concurrence des TER, des cheminots sous statut, des cheminots contractuels ou de nouveaux cheminots hors-statut se trouveraient détachés chez les nouveaux exploitants. ils devraient
tANALYSE / SNCF au nom du contenu de ce « sac-à
dos » social évoqué par Edouard Philippe, conserver leurs avantages existants. ils coexisteraient avec les personnels des groupes conces- sionnaires, qui relèvent du statut des transports publics urbains. Un statut qui devra être adapté aux contraintes et aux particularités du service ferroviaire des voyageurs...
 6quelles questions la réforMe laisserait-elle sans réponses ?
 D’abord et surtout, celle de la dette du système ferro- viaire. Même si, le 26 février, Edouard Philippe a évoqué « la question du traitement de la dette ferroviaire » en estimant que « les efforts devront être partagés. Dès lors que la SNCF y aura contribué, l’Etat prendra sa part de respon- sabilités avant la fin du quinquennat pour assurer la viabilité économique du système ferroviaire ». Une dé- marche pour le moins curieuse, dans la mesure où cette dette est en très grande partie celle de l’Etat. Ce que rappelait d’ailleurs Edouard Philippe dans son discours !...
La réalité va rapidement se rappeler à la mémoire de tous, dans la me- sure où le coût de cette dette pè- sera tout aussi lourd sur les résultats du système ferroviaire « réformé ». a hauteur de 1,5 à deux milliards d’euros par an pour les seuls inté- rêts. Et l’indécision gouvernemen- tale à propos de la dette peut se heurter aux attendus de la réforme, au cas où la transformation de la SNCF en société anonyme n’oblige pas l’Etat - unique actionnaire - à apurer la dette de l’ancien Etablis- sement Public industriel et Com- mercial. Parce que le ratio de cette
dette par rapport au chiffre d’affaires serait incompatible avec le nouveau statut de l’entreprise. a moins d’une carte maîtresse que le gouverne- ment garderait dans sa poche, il reste une sensation d’impréparation de la réforme. Et ce, en dépit des efforts, rappelés par le gouverne- ment, de régénération du réseau à hauteur de 3,6 milliards d’euros par an durant les dix ans à venir... Ensuite, la réforme ne prend pas en compte les moyens et les outils de l’aménagement ferroviaire du territoire. Fonction majeure de cet Etat stratège mise en avant à l’oc- casion de la réforme ferroviaire précédente. Cette fonction oblige à définir un réseau ferré structurant d’intérêt général, quel que soit son statut d’exploitation( 5). Un réseau qui doit être partagé entre lignes principales - y compris les LGV - lignes de maillage et lignes locales. S’ajouteraient des liaisons classiques
(5) Faudrait-il
sortir certaines lignes du Réseau Ferré National ou modifier le classement « UIC VIIàIX»qui,enfait, concerne le fret ?
(6) On pense notamment à la
« ligne 4 » (Paris – Troyes – Mulhouse), à la rocade Reims – Dijon, à Paris Amiens – Boulogne, Paris Maubeuge/Cambrai, à l’ensemble « Aubrac » plus « Cévenol » et aux lignes de Normandie.
nationales - également structu- rantes - qui seraient garanties par l’Etat. Outre le cas particulier des LGV et de l’offre à grande vitesse ouvertes à la concurrence comme les TER, elles correspondraient grosso modo aux relations des Trains d’Equilibre du Territoire... avant leur passage aux régions ! Elles pourraient bénéficier d’une sollicitude particulière(6), afin d’offrir le maillage recherché.
Enfin, la réforme offre un certain sentiment d’impréparation, en don- nant l’impression de s’être en quelque sorte nourrie d’idées, voire d’idéologie, exprimées dans les débats des dernières années comme dans le rapport Spinetta et qu’on retrouve ici « recuisinées ». le tout dans un contexte de fébrilité, justifié par une volonté de réforme, réponse à la demande de l’opinion lassée d’années d’immobilisme. z
MICHEL CHLASTACZ
Mobilités Magazine 15 - Mai 2018 - 17



















































































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