Page 54 - Le grimoire de Catherine
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J’entendais le chant de l’eau du ruisseau sur les petits cailloux de son lit. Notre but était
              proche. Impossible de trépigner mais mon cœur se mettait à battre de plus en plus vite.
              C’était le moment de complicité avec mon écolière.
              J’adorais ce partage d’émotions, elle, loin de ses soucis de cours de récréation et moi
              humant  sa  petite  main  porteuse  de  l’odeur  de  la  craie  de  son  dernier  passage  au
              tableau. A notre arrivée, elle me libérait de mon chariot improvisé, me faisait déguster
              une feuille de laitue  choisie  avec soin tandis que je lui caressais la main délicatement.
              Je lui déposais alors un baiser qui lui laissait un sillon d’argent .Harmonie !

              Complicité  avec  la  nature !  Les  grenouilles  aux  pattes  musclées  sautaient  autour  de
              nous les oiseaux se penchaient  hors du nid pour mieux nous observer. Les jardins ont
              toujours été les réceptacles des mystères et des petits  bonheurs.

              Aujourd’hui,  tout  à  coup,  une  porte  claque  annonçant  la  tempête,  l’orage  arrive
              tambourinant, éblouissant, menaçant. Les fleurs s’agenouillent, les arbres soupirent, les
              oiseaux  se  terrent  et  les  eaux  du  ruisseau  s’affolent.  Ma  petite  compagne  se  met  à
              crier,  aveuglée  par  les  larmes  des  nuages,  elle  ne  peut  me  retenir  et  je  me  voici
              entrainé parmi branchages et caillasses vers cet étang qui m’avait toujours intrigué. Le
              chaos !!!
              Le voyage s’annonce mouvementé, je me cale dans ma coquille tout au  fond de ma
              boite  en  métal.  Les  petites  notes  de  piano  espérées    sont  remplacées  par  le
              piétinement  des  chevauchées  wagnériennes !  Plus  de  barrière,  l’eau  ,tel  un  cabri
              fougueux,  dévale,  bouscule  tout  sur  son  passage,  investit  les  espaces  qui  lui  étaient
              interdits. Elle en glougloute de plaisir !
              Je quitte mon territoire et arrive devant la maison des voisins. Tout y est cimenté, je
              m’en doutais. Quel silence ! Je n’avais jamais eu envie d’y faire une visite de curiosité.
              Même la petite chouette hulotte m’avouait ne pas avoir trouvé un tronc d’arbre pour y
              méditer! Je pense que le moindre brin d’herbe qui y aurait tenté une incursion aurait été
              immédiatement arraché. Passons !

              Autre  maison,  autre  sensation.  C’est  là  qu’habite  le  joueur  de  saxo.  Il  s’époumone,
              s’époumone pour tenter de couvrir le vacarme ambiant, en vain…

              Me voilà chez le savant ! Celui qui collectionne les têtards. Ne trainons pas, il pourrait
              changer de sujet de recherche. J’aimerai tant arriver en  e-n-t-i-e-r à destination.

              Maintenant tout s’apaise, ma fameuse boîte- refuge m’a sauvé la vie. Je suis suspendu
              grâce à elle au -dessus de la superbe cascade qui plonge avec fracas dans l’Etang. J’ai
              le tournis mais quelle est cette silhouette, fantôme  qui se découpe maintenant dans la
              brume ? Une petite fille…















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