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 ÉTÉ















 Alger - Sidi Slimane  Boumerdès                        Elle est présente dans plusieurs régions du littorale


 UNE PLAGE OU LE BIKINI EST MAL VUE  Les plages de l’ex-Rocher Noir prises  La moule, un aspirateur à pollution sous la coquille
 d’assaut par les aoutiens

 es plages de Boumerdés sont prises d’assaut par de nombreux citoyens venus des
 quatre coins du pays pour gouter aux plaisirs de la grande bleue durant les der-
 Lniers jours du mois d’aout, synonyme de fin des vacances et l’approche de la ren-
 trée sociale. Ce mouvement incessant vers le littoral de la wilaya est quasi quotidien.
 Ce rush vers les belles plages de la wilaya est justifié en plus, par la canicule qui sévit
 ces derniers jours, accentuée par les feux de forêt enregistrés sur les massifs forestiers
 surplombant la région du centre du pays. …Ainsi, c’est un défilé de voitures vers les
 plages de la willaya, notamment celles du centre-ville, qui devient un rituel durant toute
 la saison estivale, particulièrement les week-ends. La politique engagée par les pouvoirs
 publics relative à la gratuité des plages a été bien accueillie par les estivants qui retrou-
 vent enfin la liberté de de se prélasser sur le sable doré et profiter des bienfaits de la
 mer, sans débourser des sommes exagérées pour le parasol, la table et les chaises ainsi
 que le parking. Cette saison, force est de le constater que toutes les conditions sont
 réunies afin que le séjour soit des plus agréables. Les plages sont bien nettoyées et la
 protection des baigneurs assurée. Au bord de la mer, le constat est simple : quasiment
 tous les espaces sont pris d’assaut dès les premières heures de la matinée. Difficile aux
 retardataires de dénicher une place. Tout le monde veut avoir les pieds dans l’eau. Sous
 les parasols, les uns s’allongent les autres discutent ou surveillent leur progéniture, et
 d’autres encore lisent ou se livrent simplement à de multiples jeux pour se détendre
 davantage. Et dans l’eau, c’est une myriade de nageurs des deux sexes, de tous âges
 qui, sous les yeux vigilants des maîtres-nageurs de la Protection civile, se laissent ca-
 resser par les eaux de la Méditerranée.
 Quant à la sécurité, elle ne fait pas défaut, puisque les éléments de la Sûreté nationale
 dans leur tenue blanche guettent le moindre geste. Qu’ils soient à pied ou en véhicule
 aux alentours des plages, ils ne laissent rien au hasard. En améliorant les conditions de
 séjour, notamment en dotant les plages des commodités nécessaires comme les sani-
 taires et les douches, les autorités locales de la wilaya de Boumerdès ont vraisembla-
 blement compris qu’il est désormais temps de joindre l’acte à la parole si l’on tient
 ituée à l’est d’Alger, discrète  qu’ils transforment en plongeoirs. En haut  la ligue de Mostaganem qui a abandonné
 réellement à la promotion du tourisme. Dans cette optique, des milliers de touristes
 plage de Sidi Slimane, dans la  de la falaise, le béton avance. Des villas se  l’épreuve après que sa planche à voile  ous sa coquille noire bleutée se cache une  ticules prises au piège et voir si certains additifs  l’agence américaine NOAA, à des expérimentations
 venant des plusieurs localités de la wilaya ainsi que d’autres contrées du pays choisis-
 commune d’El Marsa a une origi-  sont érigées défigurant un site féerique.  (louéé ) se soit endommagée, abonde  chair orangée savoureuse mais égale-  chimiques se retrouvent dans les tissus. L’idée de  sur la rivière Bronx. Ce principe est déjà appliqué
 sent la station balnéaire de l’ex-Rocher Noir du chef-lieu de la wilaya de Boumerdès,
 Snalité. Le port du bikini y mal vue  Des propriétaires d’exploitations agricoles  dans le même sens. Ce jeune internatio-  ment... microplastiques, pesticides ou bac-  couvrir la mer de parcs à moules pour absorber ces  notamment par le projet “Baltic Blue Growth” qui
 comme d’autres lieux de baignade environnants. Le choix n’est pas fortuit, puisque
 et par la force des choses interdit. Les  en vendant des terres seraient derrière ce  nal, fait la différence entre les côtes de  Stéries : la moule aspire tout, permettant de  microplastiques omniprésents n’est encore qu’un  soutient des élevages pilotes de moules destinées
 toutes les plages de la wilaya offrent en plus de la beauté féerique, toutes les commo-
 lieux sont réservés exclusivement aux fa-  désastre. A l’ouest de Sidi Slimane, se  l’Oranie et de l’Algérois. «  Ici , la mer est  surveiller la qualité de l’eau, et aussi peut-être un  lointain mirage. Mais pour d’autres polluants, les  à l’alimentation animale, en Suède, au Danemark et
 dités pour un séjour agréable, nous a déclaré Salah Eddine, un père de famille du Sud,
 milles. « Le respect de la pudeur, d’autrui  trouve la petite plage connue sous le nom  tellement polluée que cela me décourage  jour d’aider à l’épurer.”C’est un superfiltreur du mi-  processus sont bien plus avancés.  dans les pays baltes. “Cela pourrait être une partie
 habitué à passer ses vacances sur les plages du centre-ville. Slimane, un autre père de
 sont des conditions pour se baigner dans  d’ « Alger Plage ». Une centaine de per-  de participer aux compétitions », confie t-  lieu marin, avec jusqu’à 25 litres d’eau filtrés par  “A certains endroits, les moules sont utilisées, avec  de la solution” contre l’eutrophisation, qui est “un
 famille venu lui aussi avec ses enfants, n’a pas omis de citer les avantages qu’offre ce
 cette magnifique plage dominée par une  sonnes nagent sous l’œil vigilant d’un  il avec dépit .  jour”, s’enthousiasme la biologiste marine Leïla  les huitres, comme des nettoyeurs du milieu marin,  des principaux problèmes de la mer Baltique”, as-
 site maritime situé en contrebas du centre-ville de Boumerdès. « Se prélasser sur le
 gigantesque falaise », confie un homme  « ange gardien ». L’homme s’est accapare  Par contre, trois jeunes de Bel Abbes ont  Meistertzheim. “C’est un vrai modèle de bioaccu-  pour les pesticides par exemple”, note Leïla Meis-  sure la chef du projet Lena Tasse. Si ce processus
 sable doré et se barbouiller dans l’eau de cette belle plage est un plaisir à ne pas rater
 qui s’apprêtait à s’y rendre.  des lieux pour imposer sa loi aux esti-  décidé de passer leurs vacances à Alger  mulation des polluants de manière générale”, pour-  tertzheim. Dans ce cas-là, les moules récoltées dans  est sans risque pour l’Homme, pourquoi destiner
 pour échapper à la chaleur torride qui sévit à Bouira, notre lieu de résidence » a-t-il
 Avant d’emprunter des escaliers qui en  vants. «  Personne d’autre ne loue de pa-  en visitant les ses plages après celle de  suit-elle.  des eaux contaminées “ne doivent pas être man-  ces moules à l’alimentation des volailles ou des
 ajouté, en précisant qu’il continuera à fréquenter avec ses enfants cette belle plage. En
 serpentant mènent jusqu’à la plage, le vi-  rasols plantés à deux pas du rivage  »,  Bejaia. « Nous sommes très contents. On  Pesticides, bactéries, résidus de médicaments... Les  gées”, souligne Richard Luthy, de l’université amé-  poissons? Plus petites en raison de faible salinité
 milieu de journée, cette belle plage ainsi que celles situées à proximité et jusqu’à celles
 siteur se force à marquer une halte pour  confie un jeune.  n’a pas déboursé trop d’argent et au cin-  moules qui pompent et filtrent l’eau pour se nourrir  ricaine de Stanford. Mais ce n’est pas toujours le  de la Baltique, elles ne font pas recette chez les
 de la commune de Corso vers l’ouest sont ‘’envahies’’ par des estivants qui y viennent
 admirer le panorama. « C’est une plage  « Je n’ai pas loué la plage. J’habite ici, est  quième jour notre portefeuille est tou-  de phytoplancton, stockent au passage tout ce qui  cas, assure l’ingénieur environnemental, qui a éga-  amateurs de coquillages, répond Mme Tasse. Quant
 seul, en couple, en famille ou entre amis. L’afflux vers les sites balnéaires de la wilaya
 occupée par des religieux en grand nom-  c’est mon droit de travailler. Ou voulez-  jours plein », lance Amar. « Nous sommes  passe, d’où la nécessité de règles sanitaires strictes  lement mis en évidence les capacités “de suppres-  aux impacts des microplastiques et de leurs additifs
 qui dispose d’un littoral de plus de 100 kilomètres de long ne désemplit pas. Un fort
 bre. Il y a quelques années, elle était fré-  vous que j’aille », s’écrie t-il en gesticulant.  ravis par l’hospitalité des « ouled Bladi »  pour celles destinées à la consommation. Considé-  sion et d’inactivation” de bactéries comme l’E.coli  sur la santé humaine, ils sont pour l’instant très peu
 engouement vers les plages des communes côtières est enregistré quotidiennement
 quentée uniquement par les frères  A la rentrée de la plage, deux jeunes ac-  qui orientent et informent avec gentillesse  rées comme des organismes “sentinelles” de l’en-  par des moules. “Les moules qui éliminent les bac-  connus.
 notamment les week-ends où des milliers d’estivants choisissent la station balnéaire de
 musulmans et leurs familles. Depuis, elle  cueillent les automobilistes pour garder  », renchérit il.   Sous un parasol offert gra-  vironnement frappés dans les premiers par les  téries fécales évacuent la bactérie sous forme d’ex-  Selon un récent rapport de WWF, un être humain
 l’ex-Rocher Noir pour fuir la canicule et goûter aux plaisirs de la grande bleue.
 est ouverte à tout le monde. Toutefois,  votre voiture contre 100 à 200 DA. Lundi  tuitement par le « baron » d’Alger- plage,  contaminations, elles sont utilisées depuis long-  créments ou de mucus. Alors c’est bon”, poursuit-il.  en ingère jusqu’à 5 grammes par semaine, soit le
 elle a gardé sa réputation et présence en  dernier, les estivants étaient rares. Un vent  il savoure de bons moments. A l’entrée de  temps comme “bioindicateurs” de l’état de santé  Recyclage    poids d’une carte de crédit, et on en retrouve dans
 force des barbus découragent d’autres de  d’ouest a ramené avec lui, toutes les eaux  cette localité , une grande pancarte an-  des mers, lacs ou rivières qui les abritent. Des pol-  Pas de problème non plus pour la consommation  tous les recoins de l’océan, y compris sous la co-
 venir s’y baigner  », explique Said, jeune  polluées, notamment celles d’oued El-  nonce l’existence du «  club de maman ».  luants encore mal connus pourraient s’ajouter à la  des moules installées dans des eaux victimes d’eu-  quille des moules. Se basant sur des échantillons
 père de famille accompagné de ses en-  Harrach. «  Vous sentez cette mauvaise  Il s’agit d’une piscine et une plage privée  liste des substances “surveillées” par les mol-  trophisation, rassurent les chercheurs. Cet excès de  de moules récoltés au Royaume-Uni, sur la côte ou
 fants.  odeur », fait remarquer un élément de la  réservée uniquement à la gente féminine.  lusques  : les microplastiques et leurs additifs,  certaines matières nutritives, comme l’azote et le  dans des supermarchés, une étude parue dans En-
 La plage est large de cinq à six mètres.  protection civile qui vient surveiller jeunes  Le prix d’accès est fixé entre 5OO et 2000  comme le bisphénol A ou les phtalates.  phosphore issus de l’industrie et de l’agriculture,  vironmental Pollution en 2018, estimait qu’on in-
 Certaines familles préfèrent prendre place  compétiteurs d’une course à la voile.  DA. « Certaines femmes préfèrent se bai-  Dans le cadre d’une campagne en cours de la Fon-  entraîne une prolifération des algues qui s’en nour-  gèrerait 70 morceaux de plastique pour 100g de
 en contre -bas de la falaise, haute de plus  Selon lui, « toutes les plages qui se trou-  gner dans cette piscine en eau douce et  dation Tara Océan, Leïla Meistertzheim et son  rissent, et un appauvrissement en oxygène qui  chair consommée. De quoi regarder ses moules-
 de 100m pour rester à l’ombre. Hommes  vent dans le littoral de la région de Bordj  chlorée pour éviter la pollution de l’eau de  équipe ont placé des nasses remplies de moules  étouffe l’écosystème. Les moules permettent une  frites favorites d’un autre œil ? Pas pour Leïla Meis-
 et enfants s’adonnent à cœur joie aux  El Kiffane ou d’ El-Marsa, comme, Jean  mer », explique un agent de cet établisse-  sur les côtes des estuaires de la Tamise, de l’Elbe  sorte de “recyclage” de ces nutriments en se nour-  tertzheim.
 plaisirs de la baignade dans une eau cris-  Bart, la 5, Déca pelage, Qadous ou la Pé-  ment privé. Ce dernier se trouve entre  ou de la Seine. Immergées pendant un mois, elles  rissant des algues en expansion “pour grossir et se  “Moi, j’en mange”, lance la scientifique. “Le plat de
 talline qui semble peu altérée par la pol-  rouse 1 et 2 sont totalement polluées ».  « Alger- Plage » et la plage connue sous  sont ensuite récoltées, disséquées, puis congelées  développer”, explique la chercheuse Eve Galimany,  moules n’est pas forcément pire que le steak haché
 lution. Des jeunes se disputent les rochers  Le jeune athlète, Abdelhak Dhahdou, de  le nom de la «  5 ».  ou lyophilisées, notamment pour compter les par-  qui a participé avec le laboratoire Milford de  bio emballé dans du film plastique”...
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