Page 42 - Test evain
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Apports
de la recherche
Les études menées dans le cadre de l’action située et en particulier du programme du cours d’action montrent que les enjeux évaluatifs pèsent sur les activités des élèves. Ceux-ci s’engagent dans les tâches et dans les interactions avec leurs pairs de façon différente en fonction des enjeux qu’ils se donnent (Saury, Rossard 2009). Lors d’entretiens menés à l’issue de situations de travail, les élèves précisent que leurs comportements sont liés au désir de s’entraîner afin d’obtenir une note convenable et celui de montrer à l’enseignant qu’ils font des efforts pour éviter les problèmes et donner une image positive d’eux-mêmes (Vors, Gal- Petitfaux 2009). Ces résultats rejoignent d’autres travaux qui présentent la transaction “des performances contre des notes” comme un agent structurant les interactions enseignants-élèves (Evin, Seve, Saury 2013). Une autre étude éclaire la nature de l’engagement en lien avec le désir de construire une représentation de soi égale à celle du “bon” élève, au sens ou l’enseignant perçoit chacun d’entre eux avec cette finalité. Le bon élève veut afficher et renforcer ce statut. L’expérimenté s’appuie sur ses acquis pour afficher son aisance, l’élève peu à l’aise tente de gérer au mieux sa fatigue pour répondre au volume d’action nécessaire à la juste réalisation de la tâche et accorde une attention particulière au travail des autres pour ne pas se tromper de peur de, selon ses mots “se faire disputer”. Enfin celui qui accorde peu d’intérêt à ce qui se pratique, applique dans la juste mesure de ce qui permet de satisfaire au minimum
attendu pour ne pas dénoter avec le reste de ses moyennes dans les autres disciplines (Evain 2013). Par ailleurs, il a été mis en évidence que la note sert de ciment à l’activité (Durand 2002). Elle est l’enjeu central parce qu’elle est au cœur des mécanismes de certification et de régulation des flux au sein du système scolaire (accès aux niveaux supérieurs, obtention des diplômes, etc.) Ce médiateur est, par conséquent, celui qui renforce les conduites des élèves. En miroir, il est utilisé par les enseignants pour obtenir l’adhésion et la participation des élèves. Selon une approche idéalisée de l’école, l’apprentissage et les performances scolaires des élèves sont les produits ou les résultats de la qualité et de l’intensité de leur engagement. Dans les faits, les actions des enseignants et des élèves illustrent souvent un renversement. Les contenus et la note sont en fait les leviers qui permettent d’obtenir cet engagement.
Dans le cadre des neurosciences les capacités de régulation affectiveetcomportementaledusujetsontmisesenlumière pour favoriser le maintien d’un état apaisé propice aux apprentissages et au bon développement cérébral (Ludy- Dobson, Perry 2010). Dans un environnement insécure, dont celui où s’exerce une pression évaluative, les ressources de l’individu sont réorientées, non pas pour dépasser le stress mais se battre ou s’enfuir, et orienter son attention et sa disponibilité contre la menace. La voie courte privilégiée du circuit de la peur provoque des difficultés de régulation de l’anxiété dans tous les domaines, dont l’école et les situations d’apprentissage, allant de l’émotivité intense à la phobie. L’excès de cortisol dans l’organisme et sa présence prolongée provoque une réduction des capacités de rétention et d’apprentissage ainsi qu’un affaiblissement du système immunitaire.
Les enseignants ont un rôle à jouer dans cette sécurisation des élèves. Un encouragement ou une appréciation aura chez un enfant en état de stress, une valeur inestimable. Ce sera un évènement émotionnel fort qui participe à structurer sa personnalité (Cyrulnik 2015). Dans ce sillage, les travaux en psychologie neurocognitive mettent en avant, entre autres, le besoin de sentiment de compétence, de confirmation d’efficacité et d’encouragement comme l’un des besoins fondamentaux (Deci, Ryan, 2008). Le renforcement positif passe alors par la récompense et l’encouragement. Il existe un circuit de récompense qui fait partie du système limbique : le siège des émotions. La dopamine est alors appelée hormone de la récompense par l’intense sensation de satisfaction qu’elle procure. Plus le degré de satisfaction est fort, plus l’activation dans le striatum ventral est importante, plus le sujet se sent compétent, plus il a envie de recommencer (d’où le risque d’addiction), plus il est motivé à poursuivre (Pessiglione 2012).
À ce titre, le retour sur l’erreur et l’engagement actif de l’individu représentent deux piliers de l’apprentissage (Dehaene 2018). En effet, un individu apprend d’autant mieux qu’il prend en compte intérieurement les retours d’informations qu’on lui fait sur ses productions ou ses actions (feed-back) et qu’il exploite ensuite ce retour d’informations. Se tromper, c’est déjà apprendre, à condition que la rétroaction indique à l’élève la bonne voie, c’est-à- dire comment se corriger. Un retour rapide et détaillé de la part de l’enseignant permet d’enrichir les informations dont dispose l’élève pour se corriger. L’élève peut alors s’engager vers d’autres hypothèses ou d’autres processus plus adaptés pour répondre au problème posé.
1-Pouvez-vous caractériser la nature des évaluations que contiennent ces leçons ?
2-Quelles différences faites-vous entre l’évaluation certificative, sommative, formative, formatrice, au fil de l’eau ?
3 - Pour les enseignants, quels objectifs l’évaluation vise-t-elle ?
4 - Les auto-co régulations et autres feed-back sont-ils considérés comme des
évaluations ?
5 - Quelles sont les fonctions possibles de l’évaluation pour l’élève d’une part, pour le professeur d’autre part?
Évaluer au fil de l’eau




















































































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