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 Enjeux politiques et éducatifs
Antérieurement, “suivre” avait davantage pour objet le contrôle à la conformité ou encore la surveillance, dans un contexte hiérarchique où les règles, les programmes, les organisations constituent les lignes directrices à suivre, et ou la remise en question et les causes des dysfonctionnements sont renvoyées sur le sujet. Aujourd’hui, “suivre” se rapproche d’accompagner, dont l’objet est la quête de la continuité, de la fluidité ou encore de la cohérence des apprentissages. Ceci, dans un souci bienveillant (ou bien veillant) de soutien, intégrant alors la notion d’empathie, où celui qui suit cherche à s’assurer que tout est mis en œuvre pour atteindre les objectifs visés.
Ce suivi se décline à plusieurs niveaux :
Au sein de la classe :
Le suivi permet la construction de repères certains pour l’élève et d’autres pour le professeur. Il indique, à l’élève comme au professeur, où l’intéressé se situe sur son chemin d’apprentissage. Il témoigne du fruit des efforts consentis et des progrès. Dans le cadre d’une pédagogie de l’élève acteur, l’élève construit ces étapes de progrès pas à pas (Evain, Gibon 2018) avec le degré de guidage du professeur qui répond au niveau de développement des élèves (Guilon, Duret 2018). Ce suivi est formateur car il fait l’état des lieux, indique les perspectives et invite à la projection, voire à l’élaboration d’une stratégie pour y répondre. Pour ce faire, l’enseignant est un observateur qui prélève des indices qui permettent de lire l’activité de l’élève : ses réussites, ses points de tensions, ses blocages.
Il entre alors dans une démarche dite compréhensive de l’activité d’apprentissage de l’élève ou encore dans la catégorie des professeurs dit «ethnologues» (Sève 2016). Pour favoriser la prise en charge par l’élève, le professeur se rend disponible, au bon moment pour étayer, soutenir, impulser, relancer, mais en aucun cas faire à la place. Ce dernier favorise aussi des temps de métacognition au cours desquels l’élève fait le point sur sa démarche, les étapes suivies et dépassées, personnalisées, et prend alors par lui-même acte de ses progrès et de ses acquis. (cf. Fiche “Développer la métacognition”).
L’enjeu est ici fort car il rend l’enseignement et l’évaluation explicites. Tous les implicites de l’Ecole sont de nature à creuser l’écart entre ceux qui réussissent et ceux qui réussissent moins à l’école, un des écueils du système éducatif français (PISA). À l’inverse, les leviers pour rendre les enseignements explicites sont de nature
à accrocher les publics les plus éloignés de l’École.
L’enjeu est également fort puisqu’il rend l’enseignement et l’évaluation formalisables, formalisés par l’intéressé. De fait, celui-ci peut restituer à ses proches, ses parents ou autre autorité parentale, et renforcer alors la lisibilité et la visibilité de ce qui s’apprend, voire favoriser l’alliance avec les parents qui peuvent se sentir plus concernés, ou moins distants, voire exclus de l’Ecole. L’enseignant accompagne l’élève dans sa démarche. L’explicitation des compétences travaillées selon des degrés d’avancée, étapes par étapes, ou degrés de maîtrise progressive, est donc de nature à faciliter la mise en œuvre de cette intention. (cf. Fiche Évaluer au fil de l’eau).
D’une leçon à l’autre ou d’une séquence à l’autre :
Le suivi entre en écho avec une approche pédagogique par compétences dans laquelle un contexte original d’apprentissage ne suffit à l’appropriation incarnée puis généralisée des compétences requises pour dépasser un obstacle ou répondre à un objectif nouveau qui se pose à soi. Le suivi dans ce contexte trouve tout son intérêt par le fait qu’il constitue l’incontournable à l’exposition de contextes multiples à l’élève lui permettant alors de mobiliser les mêmes compétences dans des contextes pluriels. La notion de suivi questionne donc la logique de cycle en trois années, et la logique curriculaire de formation qui nécessite de penser l’enseignement non plus selon une référence cumulative de connaissances et de compétences d’une leçon à l’autre, d’une séquence à l’autre, mais plutôt selon une démarche de complexification progressive tout en ménageant des temps de récurrence. L’enseignant veille à placer ses élèves dans les conditions requises pour le développement et la mobilisation de leurs compétences.
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Évaluer au fil de l’eau






















































































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