Page 47 - Mon Anarchie

La tristitude

A force de rejet la société (en tant que l’abrutissement des masses) il arrive de se
sentir, à tort ou à raison, rejeté par la société (en tant que semblables humains). C’est dû à
une double incompréhension: le fait qu’on ne rejette pas les hommes mais leur formatage,
et souvent paradoxalement l’assimilation de ces hommes à leur formatage.
D’un autre côté, à force de vouloir chercher à aller au delà de la norme, il arrive que nos
projets mettent beaucoup de temps à se réaliser voire simplement de rencontrer un mur, ou
même une opposition directe venant de la société, des «bonnes âmes d’ici bas» comme di-
sait Brassens, ou évidemment de la loi qui ne saurait concevoir que tu sois libre.
Tout cela, mêmé à d’éventuelles contradictions ou remises en question dues à ce décalage,
peut mener à un profond sentiment de tristesse, d’autant qu’on sait que l’Idéal est juste et
les moyens pour y parvenir, dans leur globalité en tous cas, sont honnêtes.
Mais comme je disais - ironnie du sort - peu avant mon incarcération, même le malheur ça
se sublime. Apartir du moment où tu sais d’où vient le problème (cette incompatibilité pas
forcément justifiée car uniquement conceptuelle) tu as la solution: «Toute idée nouvelle est
d’abord moquée, puis fermement condamnée, puis admise comme ayant toujours été
vraie.» Le tout, la clé, c’est la confiance en soi (car comment les gens croiraient ils en toi si
tu n’y crois pas toi même ?) et la persévérance. Rien ne peut t’arrêter sauf toi, et même
s’ils le déguisent, si tu as raison les gens ne peuvent que le savoir. Alors avanti Compa-
gnon, et avec le sourire.