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exploitants, fermiers, métayers, maîtres-valets, domes- tiques agricoles et ouvriers agricoles. Les béné ciaires sont surtout les territoriaux, les hommes les moins ex- posés au feu. Elles sont ensuite étendues aux combat- tants mais les autorisations dépendent du secteur auquel le soldat est affecté. En effet elles sont suspendues si le soldat n’est pas dans un secteur calme. La question des permissions agricoles est un sujet de polémique et de frustration qui perdure pendant toute la durée du con it. Les échanges de Jean Vergne, soldat du hameau de Montjoux, avec sa famille en sont l’illustration :
battage, et Henri Balay, maître-domestique au Peyron, la plus grande propriété de la commune.
Le SMOA (Service de la Main d’Œuvre Agricole) gère les travailleurs, les place, les contrôle et assure le respect des normes (contrat de travail, hygiène, conditions de vie, ordre public). La crainte de voir des inconnus arriver dans les campagnes se manifeste à Quintenas comme le montre cette demande adressée par le conseil municipal au préfet en mai 1915 :
« Relativement à la rentrée des récoltes, nous avons l’honneur de vous exposer que la main-d’œuvre étrangère n’est pas pratique dans notre commune où la propriété très divisée ne comporte pas de grandes exploitations mais simplement des propriétés ou fermes de moyenne ou petite importance où il ne reste pour exploiter que des femmes et des enfants. Dans ces conditions la présence d’ouvriers agricoles étrangers dont on ne connaît ni la moralité ni la conduite serait très souvent un danger, ces hommes ne pouvant pas être surveillés et commandés par une autorité suf sante ».
« Je voudrais bien avoir une quinzaine de jours de permission. Je dirai au Commandant Major que depuis mon incorporation au début de Décembre 1914 jusqu’à ce jour je n’ai pu béné cier d’aucune permission même pas de 24 h » (6).
« On accorde des permissions agricoles de 15 jours pour la taille de la vigne. Il faut pour cela un certi cat du Maire indiquant que l’on a besoin d’aide pour des travaux agricoles et spécialement pour la taille de la vigne » (7).
« Gaston Léorat m’a établi mon titre de permission bien en règle dimanche dernier. Je l’ai présenté au capitaine de ma Cie mais il a refusé de la signer en disant que j’étais trop jeune et qu’il fallait être d’une classe antérieure à 1906 pour y avoir droit. Je pensais y avoir droit car j’avais été déclaré inapte pour un mois. La première circulaire du ministre de la Guerre ne  xait pas d’âge mais il en est paru une autre que je ne connais pas. Je tâcherai d’en avoir connaissance » (8).
La requête des élus propose d’y substituer des permissions agricoles pour tous les Territoriaux.
« Il y a de nouvelles dispositions pour pouvoir obtenir une permission agricole. Le certi cat doit être visé par le Maire et par le Préfet. Il y avait eu, paraît- il, des abus et c’étaient des commerçants qui avaient le plus pro té de ces permissions agricoles » (9).
Malgré les départs, la production agricole est as- surée. Cependant les statistiques fournies chaque an- née au ministère de l’Agriculture montrent des baisses conséquentes des surfaces cultivées et de la production. Pendant que les terres labourables passent de 620 ha en 1914 à 540 ha en 1918, les bois et forêts passent de 25 ha à 100 ha. On fait des choix, on s’adapte. La prio- rité est donnée aux céréales et aux pommes de terre. La baisse est conséquente dès 1915 (de 392 qt à 300 qt) mais tous les efforts permettent de maintenir une pro- duction de céréales autour de 240 qt jusqu’en 1919. Il en est de même pour les pommes de terre : on passe de 188 qt à 130 qt entre 1914 et 1915 puis la production se maintient autour de 110 qt de 1916 à 1919.
Les réquisitions pénalisent également les Quinte- nassiens. Les exploitations ne sont pas mécanisées, le cheval est encore incontournable et les prélèvements des animaux de trait par les autorités militaires sont dif ciles à pallier. Il y avait 41 équidés et 42 bœufs en 1914 et respectivement 32 et 35 en 1915.
« Mon père m’envoie une coupure du journal à propos des permissions agricoles. Il pense que je pourrai en obtenir une » (10).
« La permission agricole est systématiquement refusée à tous ceux qui présentent un certi cat non visé par le Préfet » (11).
« Maintenant je ne compte guère pouvoir obtenir cette permission agricole. Il paraît que ça chauffe dur en ce moment du côté de Verdun » (12).
Logiquement, c’est la vigne qui est sacri ée. 302 ha de vignes sont cultivés en 1914, il en reste seulement 52 à la  n de l’année 1918.
Une permission agricole de quinze jours lui est  na- lement accordée.
La circulaire du ministère de la Guerre du 12 janvier 1917 permet aux hommes les plus âgés de béné cier d’un détachement pour s’occuper de leur ferme. Une dizaine de quadragénaires sont alors de retour au village, entre autres Philomen Ruol, entrepreneur de
6. Lettre du 23 novembre 1915. 7. Lettre du 28 janvier 1916.
8. Lettre du 8 février 1916.
9. Lettre du 10 février 1916. 10. Lettre du 11 février 1916. 11. Lettre du 22 février 1916. 12. Lettre du 25 février 1916.
Trente prisonniers allemands sont affectés à Quin- tenas du 12 mai au 11 août 1916. Ils sont hébergés au Peyron et mis à disposition des propriétaires de la com- mune pour la somme de 3 F ou 3,50 F par journée.
 113 Cahier de Mémoire d’Ardèche et Temps Présent n°139, 2018













































































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