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de Tien-cha avant d’occuper des postes à Léang-Chan- hien, Tchong-tchéou et Fou-tchéou. Inutile de dire qu’au l de ses pérégrinations, le Père Michel Meillier avait eu tout loisir de parfaire sa maîtrise de la langue chinoise. Mobilisé en 1914, il était rentré au pays sans tarder. En 1917, il avait été affecté au Pouzin. Autre missionnaire-interprète à intervenir au Pouzin, le Père Frédéric Etellin (1870-1938). Ce savoyard d’origine avait séjourné en Mandchourie de 1896 à 1912. Lui aussi était sinisant. La décision de faire appel à ces missionnaires était motivée par l’espoir, qu’une fois le con it terminé, ceux-ci puissent retourner en Chine comme autant d’agents d’in uence et faciliter les échanges entre les deux pays.
ne leur délivrait quotidiennement jamais plus de 10% de cartes de sortie. La pénétration des villages proches leur était interdite et le retour au campement devait in- tervenir avant le coucher du soleil (12).
Ils avaient leur propre cuisine et leur alimentation avait fait l’objet d’une note ministérielle spéci ant leur ration journalière : 650 g de pain, 450 g de riz, 300 g de viande, 250 g de légumes verts, 15 g de graisse ou d’huile, 15 g de sel, 15 g de thé (13). Leur « trousseau » était rudimentaire et parcellaire. Il ne comportait que très peu de vêtements chauds.
Les conditions de travail qui leur étaient proposées étaient loin d’être idéales. Les terrassiers du chantier sur le Doux devaient 10 heures de travail par jour à l’entreprise Pascal et Villaret, qui s’était vue sous-traiter ce marché, et ne touchaient que 2,50 francs par jour, nourris, logés, habillés et soignés médicalement certes, mais c’était, bel et bien, la fourchette la plus basse du salaire promis initialement qui avait été retenue. Les ouvriers employés à la fabrication de la viscose, à Vals- les-Bains, étaient, pour leur part, sujets à des maux de tête, des douleurs aux mains, inhérents à l’utilisation de produits caustiques.
Chaque employé avait le possibilité de correspondre avec les siens, à raison de deux lettres par mois, et de recevoir du courrier. Les lettres venant de Chine étaient centralisées à Tsien Tsin dans les bureaux du syndicat Wey-Min et expédiées par celui-ci au service de l’organisation des travailleurs coloniaux en France qui les renvoyait à son tour aux groupements.
A compter de décembre 1917, la direction de l’armée coloniale (9) décida toutefois d’évincer les commandants-interpètes au pro t d’of ciers de carrière. Si l’on suit le journaliste Pierre Dionne, par besoin « d’embuscage » (10). Plus certainement, en raison de la multiplication des incidents et des troubles à l’ordre public. Nous y reviendrons. En tous cas, ce faisant, on prenait le contrepied des pratiques de l’armée britannique qui privilégia des connaisseurs de l’ex-empire du Milieu.
Le plus souvent, les « Fils du Céleste Empire » (11) étaient regroupés dans des centres d’hébergement à proximité de leur lieu de travail. Au Pouzin, des bara- quements en briques, aujourd’hui disparus, à quelques mètres des cheminées de l’usine, constituèrent le quar- tier chinois. Sur le Doux, on les logea à proximité du chantier dans des baraquements en planches construits à la hâte. Si l’on se e aux règlements en vigueur, on
Le Pouzin - Carte postale montrant le cantonnement chinois au pied de l’usine Horme et Buire (14)
9. Les travailleurs chinois étaient sous le contrôle du service de la main-d’œuvre coloniale créé par le ministère de la Guerre et des Colonies.
10. La Lanterne du 20 décembre 1917.
11. En Ardèche, ces hommes venaient notamment des provinces côtières du Jiangsu, du Gansu et du Guang-Dong.
12. Père Wou, Les travailleurs chinois et la Grande Guerre, éd. Pedone, 1939, p. 27.
13. Service historique de la Défense, 17 N 156, note du GQG à la Direction de l’arrière : alimentation des ouvriers chinois datée du 30
juillet 1918.
14. Association pour la recherche du patrimoine, Le Pouzin : de la Préhistoire à nos jours, imprimeries modernes, Granges-lès-Valence,
2000, p. 105.
29 Cahier de Mémoire d’Ardèche et Temps Présent n°139, 2018