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La victime est décrite, certes, comme non querelleuse, mais comme ayant de mauvaises fréquentations. Quant aux témoins chinois interrogés, ils sont dépeints comme peu  ables.
Le propre interprète des hommes de « l’autre bord du monde », Mi- chel Meillier, dans sa déposition, dénonça leur arrogance vis-à-vis des commerçants et la déso- bligeance de leurs propos à l’égard des femmes. Il  t état aussi de plusieurs rixes qui auraient mis aux prises locaux et ma- nœuvres chinois, tant et si bien que ceux-ci s’étaient procurés des cannes de fer.
dissimulation de l’arme qui prête à penser que la gravi- té des faits n’avait pas totalement échappé au protago- niste. Une arme, à l’exception de la balle tirée, retrou- vée chargeur plein. Ecartés pareillement, des propos
 Puis on accumula les
témoignages en faveur
de l’accusé. Que ce soit
son instituteur, son maître
d’apprentissage en bou-
langerie, son contremaître
à Horme et Buire, tous af-
 rmèrent qu’ils n’avaient
jamais eu à se plaindre de
l’intéressé. René Rous-
set en personne, le maire
de la cité, se porta garant
de la bonne moralité de
la famille, vantant les
mérites d’Herminie, la
mère de famille qui avait
élevé, seule, ses trois gar-
çons. Pour abonder dans
ce sens, le commissaire de
police dans son bulletin de
renseignements, mettra en
avant la promesse de cette
mère-courage de garder
son  ls auprès d’elle dans
l’hypothèse où le mineur
serait reconnu comme
ayant agi sans discernement. C’est d’ailleurs cette ligne de défense que Maître Lautier conseillera à son client. Celui-ci af rmera par conséquent n’avoir jamais eu l’intention de tuer et avoir tiré sans regarder si une personne était susceptible d’être touchée. Tactique ef - cace puisque les jurés prononceront l’acquittement et la remise en liberté.
Il n’en demeure pas moins qu’un certain nombre de questions restaient sans réponse. A commencer par la
Acte de décès de Hoang Tsen Yen (35)
  gurant dans les procès-verbaux d’interrogatoires se plaignant de la présence d’une trop nombreuse colonie chinoise et notamment cette phrase relatée sans qu’elle put, pour autant, être attribuée à une personne en par- ticulier : « Je vais en arranger un » (36). Expédiés, en n, les témoignages de Houang Tché Séou et Leng Chouan King, tous deux âgés de 19 ans. Leur version des faits différait sensiblement de celle de la défense. D’après eux, on leur aurait refusé l’accès à la salle de projection, et devant leur résistance, on aurait brandi un
 35. Archives municipales du Pouzin, registre des décès (1917). On s’aperçoit que l’orthographe du nom de l’ouvrier chinois diffère complètement de celui  gurant dans le dossier judiciaire et dans la presse.
36. AD07, ibid., déposition de Nicolas Jochst en date du 15 décembre 1917.
33 Cahier de Mémoire d’Ardèche et Temps Présent n°139, 2018































































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