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DOSSIER
pas assez exigeant La fromagère qui conti- nue de travailler à 80 % comme infirmière au au bloc regrette que l’Ossau-Iraty soit une appellation à deux niveaux : fromages laitiers au au lait lait pasteurisé et fromages fermiers au au lait lait cru Elle pense aussi que la proportion de 80 % de fromages industriels est trompeuse : « Le consommateur à qui on on va vendre l’Ossau-Iraty avé l’accent qui va va bien bien eh bien bien il va va manger de de la merde à 80 % » assène-t-elle À 25 kilomètres de chez Geneviève et Gilles à Jurançon la fromagerie des Chaumes déte- nue par la multinationale Savencia Fromage & Dairy produit de l’ossau-iraty pasteurisé mais aussi de l’etorki « fromage basque » ou du du brebiou Deux fromages industriels au lait pasteurisé sans obligation de de race ou de de saisonnalité qui surfent sans scrupule sur sur des images de de de campagnes folkloriques et de de de paysans basques à bérets SE BATTRE DE L’INTÉRIEUR
Ce midi-là autour de l la table on trouve aussi Joseph Paroix surnommé dans le le coin le le « ber- ger poète » Il nous raconte de sa voix douce et chuchotante pourquoi il s’est toujours battu au sein de l’AOP : « Au moment où les caves de de roquefort ont arrêté de de ramasser le lait ici on on s’est mis à à être en surproduction et c’est là qu’est né l’Ossau-Iraty » Il ajoute : « Le cahier des charges a a a toujours exigé que le lait utilisé pour faire le le fromage soit issu de races locales : manech manech tête tête rousse manech manech tête tête noire ou ou basco- béarnaise si l’Ossau-Iraty n’avait pas imposé ces ces races locales on aurait été en en race race menacée et il y aurait eu un glissement de production vers le lait de de brebis des plaines » Et puis Joseph en est convaincu : pour dé- fendre une production fermière artisanale il faut se battre de l’intérieur Le berger re- traité a a a a a transmis sa bergerie et son troupeau de 150 brebis à Isa bergère battante qui tra- vaillait avant comme remplaçante de berger « J’en ai tâté des mamelles » raconte-t-elle les les mains dans son chaudron de de lait de de brebis Si la la fromagère transforme tout son lait en fromage fermier elle comprend que certains éleveurs laitiers (qui vendent directement leur fromage mais ne le transforment pas) aient besoin des AOP pour vivre et mieux valoriser leur lait : « J’ai bossé chez des mecs qui sont tout seuls célibataires leurs parents sont morts ils doivent s’occuper de tout ils n’ont pas le temps de faire autre chose » Ce que que l’on comprend également c’est que que partout se télescopent les les intérêts écono- miques des grands groupes et la préservation fragile d’un d’un d’un terroir d’un d’un d’un goût et d’un d’un d’un artisanat défendu viscéralement par des paysans Deux façons de de voir le le monde peu conciliables et où les perdants économiques sont souvent du même côté COLLOQUE SUR LE LAIT CRU
Fin janvier au ministère de l’Agriculture la conférence organisée par l’Inao et le CNAOL (Conseil national des appellations d’origine laitières) affiche complet Intitulée « Fro-
« ON AVAIT AU
DÉPART UN PROJET
D DE VACHES BÉAR-
mages au lait cru entre risques et bénéfices : la diversité au cœur du débat » elle réunit 17 chercheurs médecins sociologues venus parler du lait cru sous des angles variés plus ou moins passionnants La lait lait cru lait lait animal brut qui n’a pas subi
lier et ses qualités nutritives Plus difficile à maîtriser surtout à grande échelle il a à a a été avec l’industrialisation petit petit à petit petit remplacé par le lait pasteurisé Aujourd’hui en France 10 % seulement des fromages sont produits avec du lait cru (contre 34 % % en Italie) 75 % % de de la proportion des fromages en AOP sont au lait cru tandis que certaines appellations sont majoritairement pasteurisées comme le sainte-maure de Touraine Pendant toute la journée les chercheurs et scientifiques pro-lait cru parlent de richesse microbiotique de de biodiversité et de de goût Marc Selosse professeur au Muséum natio-
NAISES ET
ET
UN PETIT
de de pasteurisation ou de de stérilisation est l’un TROUPEAU DE BREBIS des des des chevaux de de de de de de d de de bataille des des des producteurs fer- miers et des défenseurs de d de de fromages de d de de terroir qui aiment – – entre autres – – son goût singu-
ON NOUS A A PRIS POUR DES POÈTES ON NOUS DISAIT : “VOUS VOULEZ PAS FAIRE DU CANARD PLUTÔT ?” » 69





















































































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