Page 18 - MOBILITES MAGAZINE n°53
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 Politiques & institutions
EXPLOITATION PLUS MAINTENANCE, OU LE TEMPS DES CONTRATS À GÉOMÉTRIE VARIABLE
C’est l’une des retombées ferroviaires de la LOM, la Loi d’Orientation des Mobilités, de permettre aux régions qui le veulent de prendre en main la mainte- nance de voies ferrées, généralement celle de « petites lignes » TER de desserte capillaire des territoires. Sous des formes diverses, puisque cette prise en mains peut se réduire à cette seule maintenance ou s’accompagner de l’ouverture à la concurrence de ligne comme de groupes de lignes.
La première option est celle qui a été choisie par la
région Centre-Val de Loire. Après un accord avec
l’État en 2020 la région s’est vue transférer totalement
la modernisation (80 M€) et la maintenance à venir
des lignes Salbris-Valençay (la ligne à voie métrique
du « Blanc-Argent », voir Mobilités Magazine n°47,
avril 2021), Tours-Chinon et Tours-Loches (1). Une prise
en charge qui implique également la totale gouver-
nance de ces lignes avec l’entrée en vigueur de nou-
velles formes d’exploitation, le tram-train et le train
à hydrogène(2) figurant d’ailleurs parmi les options
qui seraient étudiées, alors que leur ouverture à la
concurrence n’est pas envisagée pour le moment.
La seconde option associe la maintenance et l’ex-
ploitation sur la base d’un appel d’offres. C’est le
montage imaginé par la région Grand Est pour la
réouverture, après sa remise à niveau, de la « ligne
(3)
14 » . L’axe Nancy-Mirecourt-Vittel-Merrey qui se
trouve actuellement limité à sa section périurbaine Nancy-Pont-Saint-Vincent qui a été déjà rénovée. Une opération qui intéresse fortement le groupe Transdev qui se positionnerait en association avec un partenaire issu du génie civil. Comme l’explique Claude Steinmetz, directeur ferroviaire France du groupe, « c’est un montage complexe impliquant un contrat de longue durée et qui nécessite un délai de l’ordre de trois ans entre l’attribution [du lot] et le lancement effectif de l’exploitation. Puisqu’il faut analyser l’état de la ligne et des travaux à effectuer en coopération avec SNCF Réseau (4), et examiner ici le problème des six passages à niveau qui seront à supprimer dans l’avenir. Mais aussi réfléchir à des formes d’exploitation innovantes avec des coûts optimisés et en impliquant au maximum les gens du terrain dans le cadre de structures légères, souples et dédiées à la ligne ».
La démarche est suivie très attentivement par d’autres
(5)
Garder de l’agilité dans un univers très contraint.
pour l’exploitation, une nouvelle entreprise est sur les rangs. Regioneo, une entité créée en 2020 par l’association entre RATP Dev et Getlink, le bras armé infrastructures d’Eurotunnel, fort de son expérience d’opérateur ferroviaire fret avec Europorte.
Raphael Doutrebende, le directeur de Regioneo, met en avant le fait que la nouvelle entreprise est « un vrai opérateur ferroviaire puisque qu’Europorte et la RATP ont tous deux des atouts indéniables par rapport à leurs concurrents qui sont également sur les rangs ». Avec l’expérience commune de l’utilisation du réseau comme celui des contacts fonctionnels quotidiens avec SNCF Réseau. Qu’il s’agisse des parcours sur grandes distances avec Europorte dont plus de 250 trains de fret circulent chaque semaine sur les axes majeurs du réseau, comme des parcours denses avec l’exploitation par les matériels et conducteurs RATP sur les axes communs avec la SNCF, les lignes A et B du RER. Autrement dit, le nouvel opérateur aura aussi d’emblée la capacité de « garder de l’agilité dans un univers très contraint » !
Cette ouverture du marché devrait également inté- resser très fortement à terme les loueurs de matériels roulants. Comme l’a montré la présence à l’exposition des RNTP d’un stand du groupe Alpha Trains, leader de ce marché en Europe. « Même si, pour le moment, la tendance générale reste encore à l’attente nous sommes là avec nos propositions », explique Vincent Pouyet, le directeur France du groupe. Tant il est vrai que les choix de matériels roulants à transférer, à ac- quérir ou à louer au profit des nouveaux opérateurs ferroviaires régionaux sont a priori des opérations qui devraient intervenir durant la toute dernière partie du processus d’ouverture à la concurrence. Même si, qu’il y ait mise en concurrence ou non des TER, l’option de la location pourrait également intéresser les régions. Notamment, pour prendre la place des 400 autorails et rames diesel qui doivent être impé- rativement remplacés d’ici 2030.
   régions
qui envisagent un montage assez comparable pour toute une série de lignes. D’abord celles de l’« Étoile de Saint- Pol » (Saint-Pol-Arras, Saint-Pol-Béthune et Saint-Po-Étaples), dont la rénovation s’achève. Ensuite, celles du « Triangle d’Amiens » (Amiens- Compiègne, Amiens-Creil et Creil-Compiègne). Enfin, la région pense aussi à ouvrir à la concurrence la radiale Paris-Persan-Beaumont-Beauvais.
Si, pour le moment, le lot du « Triangle d’Amiens » serait le premier ouvert à la concurrence et seulement
1) Les travaux de rénovation avec fermeture des lignes Tours-Chinon et Tours- Loches ont été lancés en octobre 2021 en même temps que ceux de la section régionale Dourdan-La Membrolle de l’axe Paris-Tours par Châteaudun et Vendôme dont la région finance plus classiquement avec l’État et SNCF Réseau la rénovation à hauteur de 50 % des coûts.
2) Une rame à hydrogène « I-Lint » Alstom devrait réaliser des essais sur la ligne Tours-Loches en 2022.
3) Voir Mobilités Magazine n° 19, octobre 2018. Keolis, Regioneo et une filiale de la RENFE espagnole, chacun associé à un groupe de génie civil, sont également sur les rangs pour l’exploitation et la maintenance de la ligne.
4) Si SNCF Réseau ne prend pas part aux appels d’offres incluant la maintenance parce qu’impliqué financièrement avec les régions, sa directrice Clients et Services Isabelle Delon, a annoncé durant un débat des RNTP qu‘un « travail intense » est mené avec les AOM régionales pout fournir les informations ad-hoc sur l’état des lignes aux participants d’appels d’offres
de ce type.
5) Certaines régions comme Sud PACA avec la ligne Nice-Digne des Chemins de fer de la Provence ou la Corse avec son réseau ferré (CFC) ont déjà l’expérience de la maintenance associée à l’exploitation.
. En premier lieu par les Hauts de France,
18 - MOBILITÉS MAGAZINE 53 - NOVEMBRE 2021
 


























































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