Page 42 - MOBILITES MAGAZINE N°43
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 Opérateurs & réseaux
  LE GRAND POTENTIEL DES PETITES LIGNES ANALYSÉ PAR LE CEREMA
 Et si les petites lignes avaient un réel potentiel qui aujourd’hui comme hier se trouve sous-exploité ? Parce qu’ignoré, il n’est finalement pas vraiment pris en compte, alors que plus de la moitié de ces lignes desserviraient des territoires plus denses que la moyenne nationale !
C’est ce qu’analyse très finement une récente étude* du CEREMA, le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement. Un établissement public placé sous la double tutelle des ministères de la Transition écologique et de la Cohésion des Territoires.
Poser la question des « petites lignes », c’est y répondre. Pour les auteurs de l’étude du CEREMA, ces « lignes de desserte fine souffrent plus d’un déficit d’offre que de demande ». Dans la mesure où l’offre actuelle - finement analysée avec une mise en exemple des cas extrêmes minimaux et maximaux - se situe en moyenne autour de « 4 à 5 trains/jour est elle-même source de problème puisqu’elle a pour conséquence une faible rotation des matériels et des personnels, donc de lourds coûts fixes, indépendants des trafics », précise l’étude. La tentation immédiate à laquelle l’exploitant SNCF a cédé au fil des années « c’est de supprimer des trains pour alléger la facture ». Et donc faire encore fuir des voyageurs existants et potentiels en raison de la faiblesse de l’offre. Alors qu’une desserte plus dense et plus attractive permettrait d’«écraser» ces coûts et de rééquilibrer le bilan. Comme le montrent les exemples comparés de deux lignes sur des territoires comparables. Morlaix-Roscoff, la française - fermée depuis - avec ses 4 trains et ses 5 autocars/jour, et Heide-Büsum, l’allemande en re- naissance et à l’offre cadencée à la demi-heure. Qui implique des coûts d’exploitation de 30% supérieurs mais pour dix fois plus de trains et de recettes et, au final, des subventions publiques qui sont dix fois moins élevées !
Autrement dit, il faut exploiter le réseau au maximum en comblant les « trous horaires » qui sur certaines lignes dépassent les quatre heures. D’autant que la notion d’heure creuse serait relative puisque, selon une étude de l’IFSTAR (Institut Français des Sciences et des Technologies de l’Aménagement et des Réseaux), les heures de pointe ne totaliseraient que 30% des besoins alors que faute d’offre les deux-tiers des ma- tériels TER restent inutilisés en heures creuses.
En même temps l’étude du CEREMA met en avant l’intérêt d’études de potentiels qui prennent en compte l’environnement de chaque ligne. Aussi bien les emplois que les établissements scolaires, les commerces et les lieux touristiques. Mais aussi les caractéristiques de la population riveraine, la proximité ou non d’une métropole, les temps de parcours routiers et les facilités d’accès aux gares.
Autre sujet, la maintenance. Puisque la transformation de l’offre « n’élude pas les besoins de travaux de ré-
* « Cerema.
Quel avenir
pour les petites lignes ? Potentiel, technique, gouvernance », col. Connaissances, CEREMA, Bron 2020, 34 pages. Téléchargeable sur le site du CEREMA.
génération conséquents sur une bonne partie des lignes de desserte fine du territoire ». Travaux qu’il convient « de dimensionner selon le rapport entre coûts d’investissements et coûts d’exploitation ». Afin de créer un ensemble cohérent, outre l’offre et la maintenance, il conviendrait aussi d’y ajouter les matériels, même si ceux existants peuvent souvent répondre aux besoins. Aussi, l’étude du CEREMA aborde cette optique en élargissant la réflexion sur le thème de la création d’un « système ferroviaire léger » qui inclurait aussi - à l‘échelle des agglomérations - des lignes de tramways régionaux à l’image du tram- train de Kassel en Allemagne avec ses rames bi- modes électro-diesel Alstom. Des « RER légers » en quelque sorte ...
Un système auquel « pourraient répondre de 2500 à 3000km du réseau ferré national (avec) vitesses limitées à 100km/h, circulations essentiellement TER et faible adhérence (ici, au sens de l’interpénétration) avec le reste du réseau ». Ce qui, en détachant tech- niquement ces lignes (au point de vue des règlements d’exploitation) permettrait d’échapper aux coûts plus élevés liés aux normes européennes dites STI (Spéci- fications Techniques d’Interopérabilité). Tout en évitant en même temps le risque « d’un trop grand éloigne- ment des standards » qui crée des situations dispersées de « systèmes propriétaires ». Aussi faut-il que le sys- tème conserve les caractéristiques ferroviaires de base. Dès maintenant, un « système frugal peut être envisagé pour faire baisser les coûts avec les équipe- ments existants : matériels mi-lourds de type X 73500, infrastructure légère et signalisation simple ».
Pour aboutir dans l’avenir à une « clé » ici résumée dans la formule « 100-100-10-10 ». Comme « véhicule de 100 places roulant à 100km/h et de moins de 10tonnes l’essieu, pour un coût de 10€ par kilomè- tre!»
Finalement, on se trouve en face d’« une alternative claire. Fermer la ligne ou l’utiliser au maximum de ses capacités avec un système optimisé, et en bon état »...
42 - MOBILITÉS MAGAZINE 43 - DÉCEMBRE 2020
 


















































































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