Page 78 - Islenska
P. 78

effrayante et rassurante à la fois. Le ciel s’assom- brissait tant, que la mer et les terres alentour n’étaient plus visibles. La brume s’épaississait. Mes jambes s’alourdissaient et mon cœur s’obs- curcissait. Il fallut lutter contre les forces malé- fiques du volcan. Elles entamaient mon esprit, attaquaient mes sentiments, immisçaient une noirceur malsaine et indélébile en moi. J’étais près de chavirer. Passer de l’autre côté. Comme j’avais failli le faire plus tôt dans ma quête. Le côté obscur. Celui de la force sombre, de l’hu- main au cœur noir, de l’humanité dominante, jugeant toute faune ou flore faible et soumise. Je virai du côté de l’injustice, de la destruction et du pouvoir. Des images défilaient dans ma tête. Mes mains en sang, je tuais des phoques, sca- rifiais des baleines agonisantes, égorgeais mes voisins par plaisir, mais sous couvert d’une clô- ture défectueuse, refusais l’hospitalité à toute personne dérangeante, enfermais des ours ma- jestueux dans des cages de trois mètres sur trois. Là, au sommet du Snæfelsjökull, je me félicitais du carnage engendré. Là, à ce som- met, j’admirais toutes les horreurs dont j’étais capable. Au nom de ma supériorité. Au nom de mon intelligence. J’admirais ces forêts dévas- tées, ces rivières asséchées, ces champs en feu, ces animaux écorchés vifs, en me congratulant de mon œuvre. J’étais une humaine avide.
Au loin, dans des méandres serpentueux, bien ancré dans des limbes impénétrables, par-des- sus les brumes et le soleil noir, à peine percep- tible, un renard roux apparut dans une neige immaculée de blanc. Son regard intense me sup- plia. Après quelques secondes de cet échange

































































































   76   77   78   79   80