Page 79 - Islenska
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oculaire, il se roula en boule comme un chat sur les genoux de sa maîtresse. S’affaissa légère- ment dans la neige. Des flocons cristallins s’éle- vèrent du sol, l’enveloppèrent, presque jusqu’à ce qu’il disparaisse. Mais je distinguais toujours ce petit être sans défense, simple tâche rousse sur un espace nivéen.
Une tempête s’annonçait. La statuette de Thor vibra. Je la retins par réflexe. La lâcher signifiait la libération de tout ce que j’avais vu dans ce pays hors normes : les cascades, les geysers, les lacs, les moutons, les phoques, les chevaux, les plantes, les fleurs, les baleines, les ours et tout le reste. Je savais pourtant que, dans le même temps, cela signifiait également notre humanité, notre fragilité, notre vulnérabilité, la fin de notre stupide entêtement à la supériorité absolue. Dilemme tragique. Mettre fin à notre technologie, à notre essor, à notre prospérité commerciale, économique, diplomatique, à nos guerres, à nos passions mortelles. Ou accep- ter la suprématie de la nature, lui rendre son âme, sa pureté, vivre en harmonie avec elle. Que serait l’humain sans les drames qu’ils pro- voquent... La vie d’une baleine valait-elle mon confort moderne... Je ruminais le pour et le contre, essayant de me convaincre que la vie de la baleine prévalait sur ma richesse fictive, faite de télévision, d’ordinateur et d’isolement. Pourtant, au fond de cet abysse sidéral, je vou- lais sauver cette baleine. Je voulais délivrer ce renard roux. Cela demandait un sacrifice que je n’étais pas certaine de pouvoir faire. La dé- cision était trop lourde. Et mon âme penchait pour notre modernité. Soudain, je sentis le par-