Page 80 - Islenska
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chemin abîmé s’agiter dans ma poche. Je le dé- gageais d’un mouvement alerte. Les strophes étaient réapparues. Toutes, au grand complet. Je n’étais qu’à un millième de poil de mollet de fourmi de remplir la mission. Chacun des vers, chacun des signes retrouvait son sens. Je relus le poème scaldique en son entier. Le choix était simple. L’illusion technologique ou l’osmose avec une nature fiable et belle. Mon choix dé- pendait de la libération des vers du poème. Je me battais contre moi-même. Sur mes épaules, un diablotin et un angelot. Chacun murmurait ses arguments. Je ne savais plus vers qui me tourner.
C’est alors que la tempête prévue se déclen- cha. Une tempête sombre, funèbre, noire. Elle ne descendait pas du ciel comme n’importe quelle autre tempête. Elle remontait des en- trailles du volcan, directement de son antre. La bourrasque mua excessivement rapidement, vi- rant du noir au blanc sans que je n’aperçoive de nuances grises entre les deux. Elle devint neige violente, acerbe. Les flocons se firent plus nombreux, ils voltigèrent, rapides, vifs, renfor- cés par un vent allié venu de nulle part. La lutte s’engagea, entre mon cœur devenu noir et mon insignifiante humilité. Les images de mon pé- riple me revinrent à l’esprit. Le dédale de châ- teaux noirs, les baleines dansantes, les chutes majestueuses, les icebergs, les fumerolles, les couleurs de l’Islande, la poésie, Ingolfur, l’elfe Sigurjón... Malgré moi, une larme coula douce- ment le long de ma joue. J’étais en train de lâ- cher prise. Le joug de ma main sur le parchemin se desserra sans que j’en ai conscience. Je me

































































































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