Page 11 - Tueuse d'Alpha - Vindicta
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à la pleine lune précédente. Elle se trouvait à présent devant moi,
           celle pour qui ma haine n’avait eu de cesse de croître depuis plusieurs
           semaines, et j’allais prendre sa vie à mon tour, mon regard toujours
           rivé dans le sien. L’heure arrivait et je le voyais agiter ses jambes
           comme s’il cherchait à se débarrasser d’une crampe.
             À mesure que le temps passait, ma détermination se faisait plus
           forte quand d’autres sentiments, comme la compassion que j’avais
           eue un instant pour lui, s’en allaient pour laisser place à une aversion
           sans limites.
             À la fin, il n’en resterait qu’un et cela devait être moi.
             Mon tour était arrivé. J’allais enfin découvrir si la Faucheuse se
           rangerait de mon côté ou si elle m’emporterait dans la plus horrible
           des souffrances, au cœur de ces cris de torture qui me hantaient
           depuis quatre longues années chaque fois que l’humain ne ressortait
           pas glorieux.
             La lune prit place sur son trône, au centre d’une mer d’encre.
           L’homme ne pouvait plus se cacher. Il essaya de se mettre au sol,
           mais je savais que les chaînes retiendraient ses vaines tentatives,
           comme je savais qu’il ne tarderait pas à se faire entendre.
             De ma position, je pouvais voir distinctement sa peau onduler
           sous la lueur blafarde du satellite. Il avait été mordu depuis peu ;
           les jeunes souffraient le martyre pendant environ un an avant de
           pouvoir se transformer sans la moindre douleur. Ils s’avéraient sur-
           tout plus féroces, les hormones travaillant sans cesse pendant cette
           première année.
             J’essayai de me souvenir de mes cours. Bien qu’ayant fait mes
           classes en bonne élève, je me montrais aussi la plus rebelle : je
           n’écoutais guère les ordres donnés. Ce comportement indiscipliné
           découlait sans doute du côté archaïque de l’Église, tandis qu’ils nous
           dissimulaient des choses afin de nous garder sous contrôle.
             J’enserrai les doigts autour du manche de mes armes, une épée et
           une dague pour seule défense. Elles ne m’appartenaient même pas,
           notre  équipement  définitif  nous  étant  remis  à  l’unique  condition
           que notre cœur batte toujours à l’issue de ce combat.



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