Page 8 - Le grimoire de Catherine
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observées puis adoptées afin de les protéger. Il avait découvert qu’elles avaient peur du
temps, qui les ferait faner, un jour ou l’autre, Il fallait intervenir rapidement car, comme
chacun le sait, lorsque la rose déserte le jardin il n’y a plus que des ronces.
Il eut alors l’idée de leur offrir un havre de paix, sa boutique. Il fallait qu’elles se sentent
en sécurité et aimées. Il leur évoquait les histoires de fées qui hantaient les légendes
du Moyen Age, ainsi que celles imaginées par les frères Grimm et par Charles Perrault.
Rien n’y faisait, elles continuaient à s’étioler !
Enfin lui vint une nouvelle idée, il leur raconta la vie des abeilles et à partir de ce jour,
tout s’arrangea. Les fleurs redressèrent leurs corolles et lâchèrent pour le remercier
toutes leurs effluves. C’est depuis ce jour qu’il acquit le surnom de « l’homme qui
parlait aux fleurs ».
Nos deux détectives, bien que sous leur charme, quittèrent leurs hôtes. La petite fille
semblait désappointée, quand soudain l’adagio d’Albinoni se répandit dans toute la
vallée. L’orgue fonctionnait de nouveau ! Le tuyau avait été retrouvé et remis en
place ! L’étonnement fut vite suivi de l’enthousiasme général ! Il est vrai que dans
une église on parle souvent de miracle mais l’enfant demeurait très intriguée. Quel
message avait pu être ainsi délivré ? A qui était –il destiné ? Le mystère n’était pas
complètement résolu.
Monsieur Meunier prit l’enfant par la main et lui proposa de remonter dans leur grenier.
Il était temps de dévoiler la clé du mystère.
-« Sais-tu petite fille, que dans ma jeunesse, je jouais de la musique ? Sais-tu aussi
que tous les instruments de cet art sont capables de jouer en harmonie ? Par contre il
est indispensable qu’ils s’expriment ensemble, qu’ils respirent en rythme ». Il continua
longtemps , longtemps à expliquer l’ amour de cet art et celui qui le liait à tous ceux
qui le faisait vivre et…révéla que c’était lui qui avait caché le tuyau d’orgue sous son lit
pour aider l’organiste qui venait d’être nommé dans leur petite église. Le problème
était que ce dernier ne savait pas jouer de cet instrument, qu’il rêvait depuis toujours
de l’approcher et de le caresser. C’est ainsi qu’il était devenu usurpateur, qu’il avait
trompé tout le monde en prétextant chercher des partitions qu’il savait inexistantes.
Monsieur Meunier, touché par cette détresse, lui avait proposé un scenario. Il dérobait
temporairement une partie de l’orgue tandis que le prétendu musicien apprenait dans
l’église voisine à maîtriser cet instrument. Il fallait pour cela gagner du temps .Ce qui
se fit en faisant patienter grâce à cette enquête. La réussite fut complète.
L’enfant était devenue très sombre, est-ce que son ami se serait moqué d’elle ?
-« Crois-tu que tu as perdu ton temps? Je pense que pendant cette promenade, tu as
appris beaucoup de choses toi aussi.
N’oublie pas de te souvenir des hommes-pions qui fonctionnent comme des
automates, sans réfléchir, accusant les premiers venus, surtout s’ils sont étrangers, de
méfaits imaginaires.
Note autre chose. As-tu observé comme les chevaux qui avaient cessé d’être admirés
avaient sombré dans l’oubli. L’indifférence des hommes avait eu raison de leur
fougue originelle. L’habitude est assassine.
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