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LE DERNIER HUMAIN
Je passe devant l’incandescence des informations transmises
assis sur le banc des accusés. Je suis coupable de somnolence
au travail, moi le dernier humain à travailler dans un
laboratoire de recherche sur le récit vrai de l’humanité au
XXIe siècle.
— Vous vous êtes endormi, avouez-le, dis le juge humanoïde
habillé d’une seule étoffe d’un seul tenant, blanche et noire, en
diagonal.
— Je dis non. Il était huit heures du matin, ce n’est pas
possible.
— Vous ne pouvez contester. Vos rythmes cardiaque et
cérébral, vos pupilles, nous confirme votre somnolence. C’est
un fait, c’est ici représenté devant vous sur cet écran.
— La vie n’est pas faite que de chiffres…
— Ne détournez pas la séance avec le mot : vie, qui n’a pas de
sens dans ce tribunal.
— Mais je suis le seul être vivant, présentement et « croix de
bois, croix de fer, si je mens, je vais en enfer ! »
— Vrai, je vous confirme et nous tenons vraiment à vous, mais
nous ne pouvons laisser un tel état de fait dans notre
laboratoire.
— Il me reste que cela. Si vous me retirez ce travail, je ne veux
pas finir au zoo. Je dis non.
— Le zoo est très bien. Confort à tous les îlots…
— Stop…
— Comment : stop ? Vous êtes dans un état qui ne correspond
pas à la Charte que vous avez signée…
— Qu’importe…
— Comment : qu’importe ?
— Se lover, là, dans le couloir du temps et reprendre mon rêve
entre humains ; s’aimer jusqu’à posséder son âme, s’étirer
dans les bras de l’autre…
— Assez ! C’est un incendie de mots qui ici est intolérable…
— « Un incendie de mots » ? Vous dérailler votre honneur, c’est
un abus de langage…
— Votre abus neige dans ma conversation d’une manière
saupoudrée…
— Euh… vous allez bien votre honneur ?
L’honneur en question a eu… l’honneur de se refaire un reset
dans la meilleure structure robobionanotique du pays. Et moi ?