Page 43 - Miettes
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la confortable couverture sociale de la banque ; devait faire face
seule au crédit de la maison et à ces nouvelles dettes en pagaille.
Elle faisait face comme elle pouvait. L’honneur était important et
elle paierait. Elle ne voulait pas faire partie à tort ou à raison de
ces gens qui ne paient pas et qui se font poursuivre par les
huissiers, autant que par la honte. Elle avait été éduquée ainsi. Ne
pas fuir mais faire face. Quel qu’en soit le prix.
Par le biais d’avocats, elle tentera de mettre notre maison en
location de sorte à couvrir le prêt en cours qui ne s’amortissait plus
faute de revenus suffisants à elle seule. Mais papa refusera
toujours de signer quoi que ce soit. La maison finit donc par être
saisie et maman se retrouvait fichée pour 10 années d’interdiction
bancaire. Le cauchemar tant redouté devenait réalité. Elle savait
que dorénavant, plus rien ne lui serait autorisé, pas même un
moindre crédit pour l’achat d’une voiture. Comment allions nous
faire ?
Car elle espérait bien se sortir de cette maladie et reprendre sa vie
active tôt ou tard… Désormais, quand bien même elle s’en
sortirait, comment pourrait-elle envisager de construire quelque
chose sereinement ? Une banquière fichée à la banque de France,
qui en voudrait ? Un travailleur sans moyen de locomotion. Qui en
voudrait ? Siphonnée de l’intérieur par la maladie, ses projets
d’avenir qui la maintenaient dans l’espoir d’une vie meilleure venait
d’être revêtues d’un voile noir opaque et impénétrable. Maman ne
voyait plus, tout était devenu noir, sombre, lugubre. Elle avait à
peine 27 ans et plus aucun projet d’avenir ne lui était autorisé par
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