Page 39 - Miettes
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Les semaines défilaient ainsi. Nous habitions chez papy et mamie
maintenant. Papa me manque mais de toute façon il allait bientôt
venir pour les fêtes. Maman demeurait sans nouvelles de lui
cependant. La distance qui s’était cimentée entre eux laissait place
à une prise de conscience : tout le soin que papy et mamie lui
accordaient, elle n’en avait pas eu une once auprès de papa au fil
des moins qui avaient précédé. Cela lui apparaissait évident que
leurs chemins s’étaient séparés, qu’un lien avait été rompu par
cette maladie qui avait voulu avaler maman.
Papa est finalement venu. Et puis il était reparti en disant qu’il ne
pouvait plus supporter cette situation, qu’il ne pouvait plus
continuer de voir maman dans cet état inchangé à ses yeux.
Je crois qu’il s’était imaginé qu’elle aurait guéri miraculeusement.
Mais ça, c’était impossible, sa maladie elle ne se guérit pas. Il
aurait dû le savoir, tout le monde dans la famille le savait. Peut-
être que ça lui faisait peur, du coup il ne posait pas de questions,
il ne demandait pas comment ça allait, jamais. Et puis cela
l’agaçait en fait. De voir maman démunie, dépendante, fragile.
C’était devenu beaucoup trop contraignant et compliqué.
Alors ils étaient tombés d’accord que cela valait mieux qu’il
reparte. Et cette fois, il n’a pas même demandé après moi, il est
reparti seul comme ça… promettant de revenir s’installer, de
déménager pour être à nos côtés dès que possible. Il louerait la
maison et viendrait chercher du travail ici.
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