Page 96 - La pratique spirituelle
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la pensée. C’est elle qui détermine alors l’état d’esprit et les
                                       *                                                 émotions.
                                     *  *                                                   La pensée est un phénomène. Vous n’êtes pas un phéno-
               « L’écoute est guérisseuse. Elle objective les souffrances,               mène, vous en êtes le connaisseur.
               sans les nourrir. La souffrance est une réaction. Ce qui
               est conscient de la souffrance est en dehors de la souf-                  Il y a en moi un état général d’anxiété, de tensions, qui ne favo-
               france. En explorant le connaisseur de la souffrance,                     risent pas le sommeil. La méditation régulière peut-elle appor-
               l’accent n’est plus maintenu sur l’objet, mais se tourne                  ter une amélioration à cet état de fait ou est-il souhaitable
                            vers ce qui le transcende. »                                 d’entamer une thérapie ? Des progrès sont constatés dans la vie
                                                                                         diurne, mais l’anxiété perdure dans la vie nocturne.
                                       *                                                    Les temps consacrés à l’écoute permettent de se familia-
                                     *  *                                                riser avec cette perspective d’observation silencieuse, qui ne
            Quand l’écoute est globale, alors les phénomènes ne sont plus                crée pas de conflit avec les phénomènes, se contentant de les
            vus comme des distractions, mais comme des pointeurs qui                     constater, tels qu’ils sont. Ce n’est qu’une fois qu’une telle pers-
            ramènent l’attention à cela qui voit. Une écoute approfondie                 pective est stabilisée, qu’elle peut se maintenir aussi dans la vie
            semble nécessaire pour s’orienter du quoi vers le qui.                       dite active, dominée le plus souvent par les projections men-
               Oui, une écoute qui est libre du vouloir. Elle est accueil                tales. Celles-ci sont alors vues, reconnues, et peuvent dispa-
            inconditionnel de la perception telle qu’elle est. La perception             raître d’elles-mêmes. Sans projection, vous êtes, dans votre
            se déploie dans l’écoute, et s’éteint en elle, sans que l’écoute             nature propre, et c’est à partir de cette nature propre que s’ar-
            elle-même en soit affectée.                                                  ticule le flot des paroles et des actions.
                                                                                                                   *
            Dans les moments d’attention, la pensée en action peut être
            observée et il en résulte un sentiment d’espace libérateur. Mais                                      *  *
            dans la vie courante, le mental reprend bien vite les rênes et               Le personnage est vu. Il perd de l’intérêt, et puis l’intérêt renaît.
            le sentiment d’être dans la pensée, plutôt que l’inverse, est                Cela est-il logique ? Est-ce la fin du désir, comme vous le disiez
            persistant.                                                                  dans une réunion ? Un retour naturel à la joie sans cause ? Il est
               Mettez-vous à l’écoute de la pensée. Laissez-la venir en                  vu que c’est la mémoire qui me rappelle de voir. Comment expli-
            vous, se déployer dans l’espace de l’écoute. Vient un moment                 quez-vous ce jeu du mental ?
            où il est évident que c’est la pensée qui est en vous, et non                   Contentez-vous de rester présente au présent, sans inter-
            vous qui êtes dans la pensée.                                                préter, ni analyser. La présence, qui actualise le présent, est
                                                                                         libre du temps, et donc des notions de passé, présent, futur.
            À la sortie du sommeil, le mental se réactive. La pensée a déjà              L’attention portée au présent est une stratégie destinée à limi-
            repris possession de tout l’espace. On est comme enfermé dans                ter la propension du mental à la divagation. Une fois le mental



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