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Décrété le 30 mars 1492 au palais de l'Alhambra de Grenade, l'expulsion des Juifs d'Espagne met fin au foyer majeur du judaïsme médiéval.
          Ferdinand d'Espagne et Isabelle la catholique décident que, le 30 juillet suivant, il ne devra plus rester un seul juif dans leur royaume
          d’Aragon de Castille ainsi que dans les îles de Sicile et de Sardaigne. Et, le mardi 31 juillet 1492 c'est 200 000 personnes qui s'expatrient et
          un millier d'entre eux vers le Maghreb ; Oran en recevra la plus grande part. Ces juifs espagnols s'installent à Fès, Meknès, Marrakech,
          Debdou, Tanger, Tétouan, Salé, Arzila, Larrache, Rabat, Safi, Tlemcen et Oran. Leur arrivée ne se fait pas sans heurts ; ces nouveaux venus
          amènent avec eux une civilisation, une mentalité et des connaissances différentes de celles du milieu autochtone ; certains ont pu emporter
          une part de leurs richesses, qui, ajoutée à leur compétence commerciale, leur avance technique et scientifique, fait d'eux de redoutables
          concurrents pour les juifs déjà installés et qui depuis des siècles au contact des arabes leur ont pris leur coutumes et parlent leur langues.
          Ainsi, par exemple, le rabbin Amram Mérouas Ephrati essaie de combattre la coutume, empruntée aux musulmans, des sept jours de
          lamentations dans les cimetières. Cependant, les sages des deux parties ont à cœur de maintenir l'unité et à l'occasion, les espagnols porteurs
          de bérets, sauront revêtir le turban. Les espagnols occupent Oran jusqu’en 1708 ; ils vont en faire une ville fortifiée car ils seront
          continuellement harcelés par les arabes des provinces alentours et parfois même étroitement bloqués derrière leurs fortifications. Étant donné
          l'isolement de la ville, le pouvoir de Philippe II est amoindri et une certaine tolérance vis-à-vis des juifs est d'abord instaurée : les juifs sont
          les intermédiaires entre ces chrétiens et les musulmans ; ils sont négociants et contrôlent l'approvisionnement de la garnison ; ils écoulent le
          butin provenant des razzias espagnoles et servent quelquefois d'intermédiaires dans le commerce des esclaves. Ils sont aussi soldats et
          touchent une solde du roi d’Espagne tel Salomon Cansino qui tua le chef des algérois Mustapha à l'occasion d'un des nombreux sièges de la
          ville . Ils occupent aussi les métiers traditionnels tels que teinturiers, cordonniers ou orfèvres. Enfin, avec la connaissance qu'ils ont, ils vont
          acquérir des positions importantes comme interprètes officiels ou agents de renseignements, tels Jacob Cansino ou le célèbre rabbin Jacob
          Sasportas. La population juive vit dans un quartier séparé du quartier espagnol, entouré de murailles et gardé par un escadron de soldats en
          armes. Les femmes ne sortent qu'en de rares occasions ; elles ont un réputation de réserve et d'honnêteté. Les plats du Shabbat sont portés au
          four public des chrétiens par des esclaves arabes. Les juifs ont l'obligation de rester enfermés dans leur quartier pendant la semaine dite
          «sainte» ; ils ont l'interdiction d' agrandir leur synagogue et nous l'avons vu plus haut, l'interdiction de prier trop fort dans la synagogue (on
          peut se demander si l'habitude de déclamer et de chanter à voix très haute dans les synagogues algériennes n'est pas une sorte de revanche
          posthume contre cette interdiction). Dans la «très chrétienne Espagne», Oran constitue la seule enclave où les juifs sont appréciés.
          Cette situation va susciter des attaques, les brimades contre eux
          reprennent et le 31 mars 1668, un arrêt d'expulsion est prononcé. Le
          rabbin Aaron Siboni raconte que le 16 avril, premier jour de Pessah,
          un orage providentiel oblige le bateau transportant les juifs bannis à
          revenir dans la rade de Mers el-Kébir. Le 22 avril, quatre cent
          soixante six juifs sont expulsés et se dispersent dans les villes de
          Livourne, Villefranche et Nice. En 1669, le marquis de Los Velez
          expulse tous les juifs d'Oran. De 1708 à 1732, la ville passe aux
          mains des turcs, les juifs reviennent nombreux. Ils sont autorisés à
          construire une nouvelle synagogue; ils pratiquent librement leur
          religion et s'organisent en juridiction autonome. Ils deviennent
          suffisamment nombreux et importants pour avoir leurs propres
          dayanim (juges rabbiniques) qui sont successivement : Joseph
          Chouchana, Isaac Chouraqui et Moïse Israël. De 1735 à 1738,
          lesespagnols occupent à nouveau Oran et les juifs sont de nouveau
          expulsés ; ils s'exilent vers Tlemcen ou Mascara. Seuls quelques-uns comme Moïse Delmas, David Soliman ou Jacob Cohen Solal restent
          dans la ville et rendent leur présence suffisamment indispensable pour qu'en 1734, ils soient officiellement invités à se réinstaller dans la
          ville. Très peu profiteront de cette offre et attendront des circonstances plus favorables, ce qui certainement leur sauvera la vie. Car, la
          mémoire populaire a conservé le souvenir de la tragédie du tremblement de terre, surtout parmi les vieilles familles juives de Tlemcen, de
          Sidi bel-Abbès, de Mascara et de Mostaganem. En effet, des familles comme les Bacri, les Benzaken, les Bénichou, les Darmon et d' autres
          qui avaient été chassées par les Espagnols et leur inquisition,  n'attendaient qu'une bonne occasion pour y revenir et de ce fait,
          s'intéressaient de très près à la vie de la cité.
          1792 marque la naissance d'une nouvelle communauté juive à Oran ; elle ne connaîtra plus ni arrachement, ni exil avant 1962. Si les juifs al-
          gériens n'ont pas été trop maltraités par les arabes, les turcs par contre, se sont montrés cruels et injustes ; partout les juifs sont enfermés
          dans le Mellah, ce ghetto hors duquel ils ne peuvent s'établir. Ils n'ont, par exemple, pas le droit de porter des lanternes et s'ils doivent
          circuler la nuit, se contenter de bougies. Comme la loi fait interdiction de circuler sans lumière, ils sont en infraction au moindre courant
          d'air. En revanche, d'autres juifs occupent le sommet de l'échelle sociale et même du pouvoir politique. Ces juifs sont dit « francs », comme
          Mardochée  Darmon ( agent commercial et diplomatique du Bey ) ou Bacri et Busnach (qui seront mêlés de près à l'affaire du coup
          d'éventail à l'origine de la venue des français). Livournais pour la plupart, ces juifs sont considérés comme étrangers et traditionnellement
          placés sous la protection du Consul de France. Le 6 Av, date de cet événement, est considéré comme jour de fête : c'est le Pourim d'Oran .
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