Page 5 - 6 Dictionnaire Généalogique Nakam_Neat
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Des courants nouveaux s'expriment dans cette presse, socialiste ou nationaliste (le rabbin Juda Alkalai est un précurseur du sionisme
politique.
Comme les communautés ashkénazes, les communautés séfarades sont frappées par l'holocauste hitlérien dans leurs centres les plus
authentiques, en Bulgarie et en Grèce surtout (la déportation des Juifs de Salonique a fait disparaître le foyer du parler judéo-espagnol).
Aujourd'hui, les communautés nord-africaines sont en cours de liquidation et les groupements séfarades de la Diaspora se trouvent en France
et aux États-Unis (plus de 30 000 à New York) ; près de 60 p. 100 de la population d'Israël sont séfarades. En Israël, si traditionnellement le
grand rabbin d'Israël séfarade, dit le Rišon le Sion, a la prééminence sur le grand rabbin ashkénaze, la vie politique, économique,
intellectuelle est largement dominée par l'élément ashkénaze, et la disparité des niveaux de vie entre l'un et l'autre élément pose un problème
grave. Les études séfarades, longtemps négligées, connaissent un essor spectaculaire avec les travaux de l'institut Arias Montano de Madrid,
l'institut Ben Zvi à Jérusalem, l'Institut mondial pour les études séfarades de New York, les enseignements de langue et civilisation séfarades
de l'Institut des langues et civilisations orientales de Paris.
L'ESPAGNE DE 910 A 1492
LES JUDÉO-CONVERS
TOLÈDE XVÈME-XVIÈME SIÈCLES DE L’EXCLUSION À L’INTÉGRATION
Nous nous rapprochons bien de ce que nous appellerions une sorte de révisionnisme de bonne compagnie. Le problème marrane en Espagne
proprement dite serait évacué. Les convers d’origine juive auraient perdu dès le XVIème siècle tout lien religieux ou affectif avec leur
communauté d’origine. Ou plutôt ils n’auraient conservé de leur appartenance juive que les réseaux familiaux de solidarité, en un mot la
fameuse entraide, au service d’une stratégie d’ascension sociale. Leur réussite au fil des siècles dans cette ascension prouverait que le
régime inquisitorial n’a pas freiné leur intégration.
Les convers ont voulu rester entre eux, pour mieux réussir, sans se mêler aux vieux chrétiens. Dès lors, l’amalgame étant réalisé, il n’y a plus
ni victimes ni bourreaux, si ce n’est dans l’imagination des Juifs et des progressistes.
On admet bien que les vieux-chrétiens renâclaient généralement à toute alliance matrimoniale avec la caste impure, mais cela coïncidait avec
le propre souhait des membres de cette caste. Oui, l'on constate que cette volonté d'ascension se traduisit par des alliances matrimoniales au
sein de l’aristoccratie. Mais Il fallait que ces convers fussent à la fois mus par une irrésistible volonté d’ascension sociale et par l’auto-
ségrégation. En somme ils ne seraient restés fidèles qu’à eux mêmes. Les évolutions sociales de ces familles converses sont intéressantes à
suivre, mais leur stratégie est-elle si lointaine de celle de toutes les bourgeoisies ascendantes en Europe ? Quant à leur dimension morale, les
analyses de l’auteur sont rarement valorisantes parce que, tout en épinglant à juste titre la petitesse de certaines conversions de cour, et en
constatant l’énorme pression politique, terroriste et économique conduisant à la conversion, il fait bon marché de la forte résistance
rencontrée chez ceux qui préférèrent l’exil, ou sauvegardèrent un espace intérieur de liberté de penser et de croire. On sait par Revah, sorte
d’aryen d’honneur de l’histoire des marranes, à en croire le brevet de rigueur historique - exceptionnel, dit on, pour un Juif - que lui délivre
Parello, qu’une synagogue fut créée à Madrid au milieu du XVIIIème siècle avec l’aide des Juifs de Livourne, ce qui montrait quelque
persévérance et combativité chez les exilés, et une belle survivance de la fidélité chez ceux de l’intérieur. Cet événement insolite, mais
révélateur, fut le signal d’une série de procès et de bûchers en plein siècle des Lumières. On aurait aimé que l’auteur nous montrât, au
milieu d’une humanité banale, quelques échantillons de grandeur comme celui-là. Fallait-il, pour l’honneur des conversos, des preuves
plus récentes encore ? Certes, rien ne résiste éternellement à l’usure du temps. Comme l’écrivait déjà Montaigne sur le même sujet, parlant
des conversions forcées à Lisbonne : … « quelques uns se firent Chrétiens ; de la foi desquels, ou de leur race, encore aujourd’hui cent ans
après peu de Portugais s’assurent, quoique la coutume et la longueur du temps soient bien plus fortes conseillères que toute autre
contrainte ».
Mais faut-il souscrire à l’analyse socio-économique de Parello pour la seule raison qu’elle serait intéressante ? Pour lui, en effet, le
dynamisme économique et social de la minorité converse constitue la preuve que les barrages idéologiques ne tiennent pas face aux
impératifs économiques. Et de constater le paradoxe d’une société qui, voulant exclure, n’en a que mieux intégré. Mais qu’est-ce qu'une
intégration qui effacerait ? Est-ce l’économie qui a provoqué l’effacement, ou la terreur sous laquelle l’identité du groupe s’est dissoute dans
les réussites individuelles de certains de ses membres ? Ce que n’ont guère compris de savants analystes s’interrogeant sur la nature
profonde des marranes, c’est que, bien au delà de la théologie, la source de leur résistance fut dans le sens judéo-ibérique de l’honneur et
que, dans leur culture propre et millénaire, le premier honneur est celui qu’on rend aux ancêtres. Il est vrai qu’on ne comprend pas sans
aimer. L’honneur de Dieu : la formule est dans les statuts des premiers mahamad des Portugais d’Amsterdam. Mais on la trouvait chez
Calvin. Elle a armé la résistance des protestants des Cévennes. Le postulat selon lequel la majorité des conversions du XVème siècle aurait
été sincère ne tient pas compte de cette universelle règle de droit : tout consentement est vicié par la force. Le réalisme conduit à croire que
les conversions proprement spirituelles, pour honorables qu’elles fussent, furent infimes. Les religions conquérantes se répandent par le fer
et le feu. Il existe, quelques fois en un siècle, une personnalité atypique ou d’exception pour obéir au seul mouvement des spéculations
métaphysiques. L’une d’elles bénéficia de la présomption de sincérité : Bergson. Il jugea contraire à l’honneur de rallier la religion
majoritaire au moment même où la minoritaire était persécutée.
LES SECRETS D'UN PASSE OUBLIÉ (par Ruffina Bernadetti Silva Mausenbaum)
« Ce n'est que tout a fait récemment que j'ai découvert que je n'étais pas unique. Il y a beaucoup d'autres comme moi qui demeurent
secrètement cachés dans un passé oublié, nés d'un peuple qui a disparu. Ces secrets refirent surface au cours des années 1930 au Portugal
quand une lumière sous la forme d'une renaissance des marranos surgit et mourut avant même de s'élever en une flamme d'espoir. Jusqu'à
maintenant enfouis sous les cendres de la peur, l'humiliation et la honte, on estime que, seulement au Brésil il y aurait entre 15 et 30
millions de personnes et peut-être jusqu'à la moitié de l'ensemble au Portugal !
Le Portugal est un pays ancien et le plus au sud-ouest de l'Europe, ses frontières inchangées depuis 800 ans, avec une histoire complète et
riche de la culture juive, son histoire et ses martyrs, sa noblesse, tout autant que ses paysans sont « entachés » de sang juif. Aujourd'hui, le
Portugal est un pays où les Juifs dominent la vie et excellent dans tous les domaines, qu'il s'agisse de commerce, d'universitaires ou
d'intellectuels. Il fut un temps ou les Espagnols ainsi que d'autres, se plaignaient que l'on ne pouvait pas, partout en Europe ou dans le
nouveau monde, faire d'affaires à moins d'avoir pour partenaire un Portugais. Portugais étant synonyme de juif !
Le Portugal s'est efforcé de devenir « Judenrein » (sans Juifs) depuis 500 ans. Un cruel prélude à ce qui se préparait avec l'Allemagne
nazie. Pour moi, avec un patrimoine portugais, cela est particulièrement douloureux de constater que mes propres origines, mon histoire et
ma culture ont été complètement effacées. Un vestige du dynamique passé juif demeure, en partie grâce à un petit garçon né à Amarante,
une ville en dehors de Porto. Il était âgé de 10 ans en 1897, lorsque son grand-père lui a dit « Nous sommes Juifs » et lui a appris le secret
de la prière dite « Crypto » de ceux qui étaient secrètement des Juifs, qui disaient en entrant dans une église ; « Je viens ici non pas pour
visiter ni le bois ni la pierre, mais pour vous adorer vous, notre Seigneur, qui nous gouverne, nous, les Crypto Juifs du Portugal »
par David Augusto Canelo 2nd Ed.. 1990.