Page 21 - LUX in NOCTE n°1
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alors d'exprimer par l'image l'évolution émotionnel des personnages ou leurs préoccupations
intérieures. C'est le cas du pèse-personne. Lorsque Tae-Suk arrive chez Sun-Houa pour la première
fois, il répare un pèse-personne. Quand elle revient chez elle sans lui, plus tard dans le film, elle la
dérègle, comme dans l'espoir qu'il va revenir la réparer à nouveau. Lorsqu'à la fin, ils se sont retrouvés,
et qu'ils montent sur la balance, elle indique zéro, comme si le bonheur les avait rendus imperceptibles
à ce monde.
Tae-Suk et Sun-Houa en parfaite harmonie
Cette ultime image où la balance indique zéro est l'expression finale de cette harmonie que
Kim Ki-duk recherche dans ses films, et trouve en partie dans Locataires. C'est cette note 20
harmonieuse qui résonne et donne le ton à tout le film : nos deux personnages trouvent enfin le
bonheur, ils se retrouvent, et, l'un et l'autre, debout, et ne pèsent rien dans ce monde. Leur couple a
trouvé l'équilibre parfaite, l'harmonie absolue, mais seulement hors du monde.
Nous pouvons peut-être comprendre cette fin comme l'impossibilité des personnes « à part »
de trouver le bonheur dans ce monde en cherchant à s'y intégrer. C'est sans doute le sentiment de son
auteur qui a tant de mal à se faire comprendre et reconnaître dans la société coréenne qui regarde ses
films d'un œil très critique. Quoiqu'il en soit Locataires reste une œuvre d'art, qui joue avec les
extrêmes comme dans l'espoir de trouver l'absolu.
Marie Laure ROUCHON