Page 242 - test
P. 242

CHOIX… EN CROIX.

        Il y a la douceur de vivre et l’art de vivre. Je me demande
        lequel choisir. Et puis, est-ce bien raisonnable ? Choisir ? Est-
        ce que j’ai choisi de boire ? Non ! La première bière est venue
        toute seule sur la table par un moment de tristesse. Elle, non
        plus, n’avait rien demandée. Elle n’avait pas souhaité naître en
        bière, d’un père Houblon et d’une mère Levure.

        On va pas refaire le monde, il est déjà assez défiguré dans tous
        ses tissus et ses coutures craquent sur toutes pointes de la
        rosace. Bref, je vais continuer par un blanc pur jus de raisin
        d’égrappée à la main et forniqué par des pieds rudement nus.

        Je devrais aller dormir mais je ne vois déjà plus l’escalier qui
        s’est  barré avec  un  autre…  colimaçon.   Je  crois   que  je  vais
        roupiller sur place. Tiens, j’entends des craquements par là et
        par ici sur ma gauche. Mais que vois-je, un textile qui déchire
        la nuit avec impatience. Je me demande si tout cela est bien
        raisonnable. J’ai les yeux qui piquent et la mâchoire qui se
        détend comme un gouffre sans fond. Bizarre, mon attitude. En
        fait, elle est ma surprise : je suis assis en califourchon sur des
        bûches de frênes à la cendre comme socle et suis à la braise
        déconfit d’un alcool frelaté jusqu’à la dernière molécule d’os…

        Je suis  en train  de  prendre le  dernier… train  de  vie… une
        bonne   raclée…   et   je   pleure   comme   un   gosse   qui   voit
        disparaître   son   arc-en-ciel…   je   me   suis   perdu   et   l’effet
        rétroactif de ma souffrance me coupe la respiration dans un
        dernier souffle rappé, drapé, poinçonné… et je m’agrippe à une
        vision de toi pour ce passage de sable trop blanc, trop frais,
        trop…
   237   238   239   240   241   242   243   244   245   246   247