Page 5 - Fable Première (de la Fontaine)
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NOTICE SUR
JEAN DE LA FONTAINE
Il y a des écrivains sur lesquels on n'a jamais tout
dit, parce que le sujet est inépuisable, et avec lesquels
on ne craint pas les redites, parce que, tout connus
qu'ils sont, personne ne se fatigue d'en entendre parler.
La Fontaine est de cette famille : aucun poète n'a
été loué plus souvent et par autant d'habiles critiques ;
aucune biographie n'a été tant de fois reproduite, ni
détaillée avec autant de complaisance ; et cependant
d'autres critiques et d'autres biographes viendront, qui,
pas plus que nous, ne s'inquiéteront d'avoir été
devancés. Pourquoi, en effet, se refuser à soi-même et
interdire aux autres le plaisir de parler d'un vieil ami
d'enfance dont le souvenir est toujours nouveau et
charmant ?
Celui qui devait illustrer le nom de bonhomme
naquit, le 8 juillet 1621, dans une petite ville de la
Champagne, Château-Thierry, où son père, Charles de
La Fontaine, exerçait les fonctions de maître des eaux et
forêts. Sa mère, Françoise Pidoux, était fille d'un bailli
de Coulommiers. Enfant aimable et nonchalant, il
étudia avec mollesse, et le cours de ses études ne révéla
aucun des germes de son génie. A vingt ans, après avoir
lu quelques livres de piété, il se crut la vocation de la
vie ecclésiastique, et il entra au séminaire de Saint-
Magloire, où il ne demeura qu'un an. Son exemple y
avait entraîné son frère Claude, qui persévéra.