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Les Brèves d’Anna

P ar ution du 20/04/20 1 7

ticipe aussi pleinement du plaisir de se
EGOPORTRAIT ou Pourquoi pas moi ? faire portraiturer. Car si la demande de
représentation des tiers se porte, pour
des raisons évidentes de respect des
personnes, sur des factures très réa-
listes, celle de soi-même autorise plus
de latitude et peut souscrire aux inter-
prétations déstructurées, déjantées
ou satiriques. Car un portrait délivre
évidemment bien plus qu’une simple
ressemblance. Il traduit non seule-
ment une apparence physique mais
inscrit aussi en filigrane une person-
nalité. Il détient en lui-même toute une
histoire, l’histoire de sa genèse. L’occa-
sion pour laquelle il a été commandé,
les raisons qui ont motivé le choix
particulier d’un artiste, les aléas des
étapes de sa réalisation. Il se crée ainsi
entre l’œuvre et le commanditaire
une relation intime à laquelle aucune
pièce d’origine indifférentiée ne pourra
prétendre. En ce qui nous concerne le
u 27 avril au 6 mai dans le cadre surdimensionné. La crainte d’être moteur premier de notre galerie de
Dgénéral de notre thématique obligé, comme le projetait le Marquis portraits est de personnaliser une par-
annuelle «Réfraction» nous abor- de Montespan pour d’autres raisons, tie de notre collection, de la recentrer
derons le genre très classique mais de faire élargir les portes de ses rési- sur nous au travers de mêmes figures
aujourd’hui délaissé du portrait. Nous dences afin de pouvoir y passer avec interprétées par le ressenti d’artistes
ne l’aborderons pas du point de vue une tête enflée. Il est d’ailleurs repré- que nous apprécions. Tous les artistes
de l’artiste mais de celui du comman- sentatif de cette gêne que la plupart que nous présentons dans cette ex-
ditaire. Nous pensons que l’art de la des clients qui ont tenté l’expérience position n’«appartiennent» pas tous
commande, qui fut une des mamelles avec nous l’ont fait dans un premier à Galerie Anna-Tschopp et ceux que
nourricières des artistes pendant des temps pour des proches et plus géné- nous avons sollicités n’ont pas tous ac-
siècles, pourrait être en voie de renais- ralement des enfants ou petits-en- cepté. Certains parce que leur style ne
sance. La photo numérique par ses fants. On peut alors se demander quel s’y prêtait pas. Pour d’autres la charge
milliers de clichés oubliés sur carte mé- intérêt a un collectionneur à s’arrêter de leurs emplois du temps ne le leur
moire, jamais vraiment mobilisables sur sa propre personne. Cet intérêt permettait pas. Mais nous pensons
car toujours perdus dans une arbo- s’échelonne sur plusieurs niveaux. que les lignes peuvent encore bouger.
rescence mal contrôlée, lui laisse en Tout d’abord celui de faire travailler Nous espérons par cette exposition
effet à nouveau un espace. Toutefois un artiste dont il apprécie l’œuvre susciter l’intérêt de nos visiteurs et les
en matière de portrait, être comman- dans un cadre très personnel. Puis inciter à entrevoir les possibilités et les
ditaire n’est pas à la portée de tous. Il le fait qu’une toile ou un bronze sont plaisirs que peut offrir l’«Egoportrait».
faut non seulement savoir accepter le rarement remisés dans un tiroir et que Il suffit d’oser. Ce qui n’est pas si facile
regard d’un autre sur soi-même mais leur «consultation» au mur ou sur un dans un temps d’ultra-conformisme
quelque part aussi le cautionner. La socle est quasi quotidienne. Quand, du langage et des comportements.
principale retenue provient d’ailleurs avec le temps, ils ne se «voient» plus, Nous avons osé. Certains de nos dé-
de l’inquiétude d’être catalogué par leur présence est cependant toujours tracteurs cinéphiles diront que c’est
les tiers comme détenteur d’un ego ressentie. La manière des artistes par- même à ça qu’on nous reconnaît.

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