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LA MAJESTE DE SAINTE FOY DE CONQUES
Marie Sonia Rouchon
VIIIè siècle (âme de bois) / début du XIè siècle pour l'essentiel mais modifications
de l’œuvre jusqu'au XIVè siècle (Aveyron) - Reliquaire en or, argent, pierres
précieuses et semi précieuses sur âme de bois (la tête étant probablement un
remploi d'une ronde-bosse romaine) - Contenant un morceau du crâne de sainte
Foy d'Agen - Hauteur : 85 cm - Conques, Trésor de l'abbatiale Sainte-Foy (Aveyron)
La sainte qui est assise sur un trône est en fait un reliquaire. La majeure
partie de cette œuvre date principalement des environs de l'an mil. Il s'agit d'un
1
objet composite : l'âme de bois (de l'if) est recouverte de plaques d'or où sont
insérés des bijoux divers (pierres précieuses de couleur, cabochons (améthystes,
émeraudes, opales, agates, jades, saphirs, cornalines, grenats, cristaux de roche) et
pâte de verre pour les yeux. Sur cet objet plusieurs techniques d'orfèvrerie ont donc
été mises en œuvre, associées à la rencontre d'objets de périodes différentes : par
exemple, la tête d'empereur romain ou d'une statue païenne, témoignage de l'art de
l'antiquité tardive (IVè-Vè siècle). Enfin, sur le ventre de la sainte se trouve une
porte constituée d'arcades gothiques (XIVè siècle), qui permet d'accéder aux
reliques mais surtout de les voir pour en être encore plus près (important pour faire
entendre ses prières) : les arcs brisés relativement élancés et le fleuron polylobé sont
caractéristiques d'un style gothique tardif.
L'âme de bois date probablement
de l'époque carolingienne, ce qui signifie
qu'il y avait sans doute déjà une statuette 24
en ronde bosse à cette date. A partir du
Xè siècle environ, de pieux et généreux
pèlerins donateurs – et surtout donatrices
– ont commencé à la recouvrir de
plaquettes d'or et de divers dons : bijoux,
chaînes, alliances … Cette accumulation
se poursuit donc environ jusqu'au XIVè
siècle. Cette Majesté apparaît donc en
quelque sorte comme une synthèse de
nombreuses techniques de création. La
tête est d'ailleurs à ce titre l'une des parties
les plus surprenantes : il s'agit très
probablement d'une tête d'empereur
romain remployée pour faire cette jeune
fille. Le visage est donc un peu dur et
1 Des études et des travaux de restauration ont été menés en 1954-1955, ce qui nous permet
d'envisager assez précisément les détails de la fabrication du reliquaire.