Page 42 - Neant
P. 42

UNE SOIRÉE EN SUISSE














                                                                                                    “Techno

                                                                                              Toujours pareil
                                                                                              Boum-Boum dans

                                EXPÉRIENCE Chaque numéro, Neant part à la découverte de       les oreilles”
                                                                                              Salut c’est cool
                                la vie nocturne des jeunes suisses. Cette fois, nous avons dansé
                                toute la nuit sur le rythme endiablé de la musique techno dans
                                un parking genevois,  et nous l’avons regretté.

                                                 ✒ LOÏC TOTH     LOÏC TOTH


        1. C’est quoi ?                                       de la gare nous annonce que notre train arrive, tout-fous, la petite meute d’iv-
        Dans la page précédente, je vous disais que les jeunes suisses ont tendance   rognes se lève du banc, marche en direction du train, et y entre. C’est pire
        à ne pas se mélanger entre eux, eh bien il y a une exception à la règle, un en-  qu’un zoo la dedans, il est 23h, et les hordes de jeunes fêtards sont déjà
        droit ou tous se retrouvent pour festoyer joyeusement ensemble : Les soirées   déchainées, ça ri, ça pleure, ça hurle, ça s’insulte, certains vomissent déjà
        techno. Ayant fait son grand retour depuis une année ou deux, la techno,   leurs tripes un peu partout, le tout sur un doux fond musical provenant de vingt
        musique anciennement considérée comme beauf dans les années 90, est   sonos différentes. On va bien s’amuser, me dis-je, avant de sortir une bouteille
        désormais une musique à la mode. C’est à Berlin que cette nouvelle vague   de vodka de mon sac afin de pouvoir supporter le trajet. 45 minutes plus tard,
        de musique techno est née, contaminant peu à peu notre pays. Ainsi, dans   nous sommes à Genève, nous avons survécu à ce trajet en enfer. À ce stade,
        toutes les villes suisses, des jeunes de tous horizons se targuent d’être ceux   je ne sais pas ce qui m’attend, mais je n’ose même pas y penser.
        qui aiment la « vraie techno », d’en avoir écouté bien avant que celle-ci ne soit   3. C’est sale
        à la mode, et d’être la personne qui connait le mieux le milieu «underground»   Les raves, c’est très souvent illégal, ça se passe donc dans des coins perdus
        de ce style de musique. Ils sont alors plusieurs centaines voire milliers à se   de la ville, souvent dans les zones industrielles reculées de toute civilisation.
        rassembler chaque weekend afin d’écouter un Dj inconnu soi-disant berlinois   Nous allons donc devoir nous farcir un interminable trajet composé de deux
        (parce qu’il a une fois mixé dans un bar là-bas) dans une boîte miteuse, afin de   trams et de vingt minutes de marche, pour enfin arriver dans une zone im-
        se défoncer le cerveau sur les poum tchak poum tchak poum tchak intermina-  monde de la ville, un enfer de béton et d’acier, qu’on pourrait croire à l’aban-
        bles de cette musique. Comme j’aime me faire du mal, et que je suis curieux,   don. Mais non, du milieu de ce néant résonnent des basses, nous sommes
        je suis allé découvrir ce milieu par moi-même afin de vous faire part de cette   donc sur la bonne voie, la fête n’est pas loin. Trente minutes à errer dans la
        désastreuse expérience                                zone en se repérant qu’à l’ouïe, et nous trouvons enfin la soirée, elle se trouve
        2. C’est perdu                                        au sous-sol d’un grand parking visiblement désaffecté depuis bien longtemps.
        Nous sommes un vendredi soir du mois d’octobre, la nuit est déjà tombée, et   Il y fait complétement nuit, et pourtant plusieurs centaines de jeunes trainent
        un vent glacial me pénètre alors que j’attends le train direction Genève avec   à l’extérieur, à boire, fumer, gober des pilules de toutes les couleurs, renifler
        mes potes. Pour se réchauffer, et pour faire passer le temps, nous attaquons   un tas de poudre blanche, et parfois, à discuter. L’ambiance ne me réjouit pas,
        nos premières bières. Puis une douce voix sortant tout droit des haut-parleurs    mais nous nous engouffrons tout de même dans les abysses de ce parking.
        42

                                                                                                            Loïc Toth
   37   38   39   40   41   42   43   44   45   46   47