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La Chaloupe - décembre 2017
           RONDOSSEC. Le dimanche 13 mai 1790, après pu-           1 livre de 1650/1700  ......................  16 euros.
           blication  par  les  crieurs  publics  de  PLOUHARNEL,   1 livre de 1789 …………………. 8/9 euros (1 pou-
           CRACH,  CARNAC,  PLOEMEL  et  ERDEVEN,  les          let de l'époque vaudrait environ 2,5 euros, 1 canard 6
           biens mobiliers sont mis en vente . Les trois aînés des
           enfants  en  rachètent  près  de  60%,  mais  c'est  la  fin...   euros; 1 douzaine d'œufs 2 euros).
           Dès le 17 mai, ils décident de céder l'ensemble de la   (Et le FRANC a remplacé la livre le 18 germinal an
           tenue de KERARNO (dont le propriétaire  foncier est   III, soit le 7 avril 1795).
           désormais  Monsieur  Du  ROUGE)  à  Mathieu  ERDE-
           VEN,  leur  voisin  et  cousin  dont  l'aide  leur  avait  été   IMPÔTS DIRECTS
           précieuse.  Pour  l'évaluation  de  la  valeur  totale  des   Le  plus  ancien  est  le  FOUAGE,  créé  à  l'époque
           biens, des experts sont nommés et prêtent serment à la   ducale, perçu initialement par FEU (foyer, maisonnée
           Sénéchaussée d AURAY dès le 24, et le "mesurage" et   où pouvaient se trouver 2 ou 3 ménages au sens actuel
           "prisage "s'effectuent du 26 au 29 mai : montant total   du  terme),  mais  assimilé  à  la  TAILLE  royale  après
           estimé : 3048 livres dont environ 68% pour les bâti-  l'annexion  du  duché  de  Bretagne.  Le  montant  global
           ments Joseph Le QUELLEC recevant 5/8e en tant que    en était fixé par le CONSEIL du roi, après tractation,
           tuteur des 5 mineurs, et chacun des aînés, l/8e . L'aîné   en  ce  qui  nous  concerne,  avec  les  ÉTATS  de  BRE-
           des  enfants,  François  restera  encore  quelques  années   TAGNE (qui ont souvent réussi à en minorer le mon-
           sur place avec sa femme Thurianne Le Guennec, puis   tant), puis réparti entre les diocèses et finalement entre
           le  couple  ira  s'installer  a  KERHELLEGAN.  Ainsi   les  paroisses.  À  ce  niveau,  une  sorte  de  Conseil  Pa-
           s'achevaient  150  ans  de  présence  Le  BAIL  -  BER-  roissial (appelé parfois général de paroisse) en assurait
           TIC... et les ERDEVEN prenaient le relais pour tout le   la  répartition  entre  tous  les  contribuables,  en  en  dis-
                                                                pensant les plus pauvres, et en tenant compte le plus
           19e siècle.
                                                                possible  de  la  valeur  de  terres,  et  d’une  estimation  -
              Si l'on connaît ainsi beaucoup mieux la situation de
           ces paysans - au moins momentanément - aisés, c'est   approximative - des ressources de chacun (y compris
           qu'ils ont eu beaucoup plus affaire aux notaires et aux   artisans  et  marchands).  Nobles  et  assimilés,  et
           juges de la Sénéchaussée d'AURAY et qu ils ont par le   membres du clergé en étant totalement dispensés. En-
                                                                suite, des collecteurs, désignés chaque année (à tour de
           fait même, laissé beaucoup plus de traces écrites.
                                                                rôle),  -  et  solvables  car  ils  devaient  impérativement
                                                                fournir  au  Diocèse  la  somme  demandée  (fût-ce  aux
           LES IMPÔTS / PAYSANS « TAILLABLES et
                                                                dépens  de  leurs  propres  deniers)  -  avaient  pour  mis-
           CORVÉABLES À MERCI »                                 sion  de  récupérer  auprès  de  chaque  contribuable  la
                                                                somme prévue (ils disposaient pour cela de « rôles »
              L'expression  «  taillable  et  corvéable  à  merci  »  a   ou  rouleaux  sur  lesquels  étaient  inscrits  les  dus  de
           subsisté dans le langage courant. Si les paysans, tout
                                                                chaque foyer).
           au moins ceux qui possédaient quelque chose, ont tant
           crié misère tout au long du 18e siècle et l'ont fait sa-  Puis, en 1695, est créée la CAPITATION pour sub-
           voir par le biais des «  Cahiers de Doléances »  à la   venir  aux  nouveaux  besoins  financiers  du  royaume
           veille de la Révolution, c'est qu'ils se sentaient effecti-  « saigné à blanc » par les nombreuses opérations mili-
           vement  accablés  d'impôts,  comme  la  majeure  partie   taires du règne de LOUIS XIV, En principe, sont pré-
                                                                vues 22 « classes » allant de 1 livre pour les journa-
           des non-nobles d'ailleurs.
                                                                liers (ou équivalents) à 2000 livres pour les princes de
              Un exemple : celui de la veuve BERTIC (Lorette    la famille royale, avec collecte encore assurée, comme
           Le PORT) dans les années 1750, quelque temps avant   pour  le  fouage,  par  le  canal  des  diocèses  et  des  pa-
           son  décès  (1756,  à  environ  44  ans),  alors  qu'elle  ne   roisses.  Mais  le  clergé  s'en  déchargea  assez  vite  par
           possède plus,  de  la  tenue de  KERARNO, à domaine   l'« offrande » au roi d'un « don gratuit » répété tous les
           congéable,  que  sa  «  maison  et  écurie  couverte  de   5 ans, et les nobles arrivèrent peu à peu à en réduire
           paille », un jardin potager dont « les légumes ont été   leur  participation,  de  telle  sorte  qu’une  nouvelle  fois
           consommés », une aire à battre et 10 journaux dont 7   l'essentiel  en  retomba  sur  les  non-nobles  (même  les
           de terres labourables ...et que son revenu total est esti-  bourgeois de certaines villes arrivèrent à s'en faire dis-
           mé à un peu plus de 166 livres, couvrant tout juste les
                                                                penser).
           frais de semence, de culture et d'exploitation, plus les
           réparations, elle doit régler à son propriétaire foncier,   Et  il  en  fut  pratiquement  de  même  pour  les
                                                                                                  er
           son « seigneur » (le comte de GOUYON), tant en ar-   « vingtièmes » instaurés à partir du 1  janvier 1750,
           gent qu'en froment, avoine et paille, l'équivalent de 63   en  principe  toujours  pour  combler  les  déficits  du
           livres, 6 sols, et 6 deniers Elle doit en outre une dîme   royaume,  et  ce,  après  quelques  années  de  tentatives
           évaluée à 4 livres, 2 sols et 2 deniers 1/2, les fouages   d'instauration  d'un  dixième.  On  emploie  le  terme  de
           (5 livres, 8 sols, 9 deniers), la capitation (6 livres), le   vingtième au pluriel, car, en fonction des besoins, il y
           vingtième (4 livres, 18 sols), sans compter les corvées   eut  momentanément  un  second,  puis  un  troisième
           (évaluées à 39 livres) et toutes les taxes venues peu à   vingtième, dont le clergé se trouva encore totalement
           peu grever la vie de chaque jour.                    déchargé.
              N.B. : Pour mémoire, 1 livre vaut 20 sols (ou sous)   Autre impôt direct, très particulier, la DÎME. Une
                                                                des  sources  les  plus  importantes  des  revenus  de
           et 1 sol 12 deniers.
                                                                l'Église,  qui  existait  depuis  le  Haut  Moyen-âge.  La
              1 livre de 1600 est estimée, au cours actuel, à envi-
                                                                dîme se prélevait sur tous les fruits de la terre, y com-
           ron 32 euros.
                                                                pris sur les propriétés nobles.


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