Page 385 - Christian Maas Full Book
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La vie de Christian Maas est un carrefour, le croisement de bien des routes; son oeuvre un rendez-
vous d’influences multiples, une simultanéité d’expériences appartenant à des êtres très éloignés les uns
des autres mais lourds du pressentiment de leur future rencontre, le lieu privilégié de la nouvelle nais-
sance de créatures dispersées qui ont vécu une vie éparpillée en divers lieux du monde.
De Montaigne opposant son “moi de tantôt” à son “moi d’à cette heure” jusqu’au
“je suis l’autre” qu’écrit Nerval sur la photo de Nadar et au “je est un autre” de Rimbaud, tout homme
quelque peu sensible a ressenti, un jour ou l’autre, au plus profond de lui–même, la fragilité de l’unité de
sa propre personnalité. Cette expérience est souvent celle de l’écrivain ou du poète comme de l’artiste en
général. Elle est au plus haut point celle de Christian Maas : le voyageur des années 80 est autre que le
sculpteur des années 90, tout en restant fondamentalement le même : un esprit tourmenté en quête du
bien impossible mais salvateur.
Cette expérience qui, pour être celle privilégiée de l’artiste, est loin d’être épargnée au com-
mun des mortels, connaît sa première manifestation dans le dédoublement de la personnal-
ité. Ce dédoublement peut s’exprimer dans la dualité de l’homme et de la femme, dans le mé-
lange des deux éléments féminin et masculin qui se rencontrent inévitablement dans tout
homme et toute femme, comme le yin et le yang au coeur du tao. Ce qui faisait dire à Flaubert :
“Tout homme porte une femme en lui”, de même que toute femme porte en elle un homme. Par-
adoxalement, contrairement au mythe de la “femme–objet” (dont nous avons déjà dit dans
Planète Maas publié en 2000 (FNAC) que les sculptures de Chistian Maas apportent un cin-
glant démenti), la vraie féminité ne consiste–t–elle pas à revendiquer cette part de masculin-
ité qui est en elle, de même que, réciproquement, la vraie masculinité consiste à revendiquer
sa part de féminité. Cette vérité, Christian Maas a pu la traduire non seulement dans son art mais dans sa
vie la plus quotidienne, notamment dans sa tenue vestimentaire, lui, ce raffiné en matière d’habillement
(alors que je lui avouais un jour que seuls les habits féminin me plaisaient et me convenaient vraiment, il
me répondit : “Et qu’est–ce–que tu crois que je porte”).
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