Page 17 - Tueuse d'Alpha - Vindicta
P. 17

Je la vis essayer de détendre sa jambe sans faire de bruit et grimacer
           tout le long de cette opération délicate, son genou ankylosé par toutes
           ces heures sans bouger.
             Cinthya n’avait pas eu de chance lors de son examen final. Bien
           que celui-ci doive rester secret, nous avions appris que sa proie
           était déjà transformée à son entrée dans l’arène, le mois précédant
           mon ascension. Si je n’avais toujours aucune idée de comment les
           choses s’étaient déroulées, je me souvenais très clairement des mois
           qui avaient suivi sa victoire, passés dans les draps de l’infirmerie.
           Elle hurlait souvent, à l’époque, de douleur ou de peur lorsqu’elle
           émergeait de ses cauchemars. De ce combat, elle avait conservé une
           balafre qui remontait le long de sa jambe, souvenir indélébile de ce
           que nous appelions dans notre jargon « la résurrection ». Car, ce
           jour-là, nous abandonnions ce qui faisait de nous des êtres humains
           lambda pour renaître en tant que chasseurs.
             Je commençais à m’impatienter et regardai l’heure : cela faisait
           belle lurette que le carrosse de Cendrillon était redevenu citrouille.
           Mais où diable pouvait être ce maudit loup-garou ?
             C’était une nuit de pleine lune, il ne pouvait nous échapper. Une
           fois parfaitement rond, l’astre exerçait un contrôle sur eux. Aucun
           moyen de se transformer aussi facilement en homme pour passer
           entre les mailles du filet, surtout pas avec ce ciel dégagé. De plus,
           nous nous trouvions en plein sur son territoire, à quoi jouait-il ?
             Certains loups-garous n’aimaient pas chasser plus de deux jours
           d’affilée au même endroit, au risque d’attirer l’attention sur eux,
           mais ce n’était pas le cas de celui-ci. Il avait décidé de prendre
           possession des lieux. Un mois que cela durait et malgré cela, mes
           supérieurs avaient eu du mal à le localiser. Les victimes étant
           éparpillées dans le temps, il avait fallu attendre la mort tragique
           d’une adolescente, disparue deux semaines plus tôt. Il ne restait de
           la pauvresse que ses os, délestés du moindre lambeau de chair et
           entassés dans un coin.
             Ici, c’était  son terrain  de chasse, son garde-manger. Avant tout
           ennemis, nous étions surtout des parasites sur son territoire. Sa colère



                                                                          17
   12   13   14   15   16   17   18   19   20   21   22