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IL EST PARTI CHERCHER SA JAMBE DE BOIS

        « Il est parti chercher sa jambe de bois… hier » c’est tout ce
        que je peux tirer de cet énergumène allongé sur le bord du
        trottoir. Il est vingt-trois heures vingt et les derniers mots d’un
        témoin qui vient de perdre la vie et qui vient de gagner son
        paradis à l’instant… enfin, j’espère.

        Je suis détective, à mes heures et pas privé. J’aime me mêler
        de ce qui ne me regarde pas. C’est un fait établi. Je suis seul
        avec ce cadavre tout chaud, tout frais (c’est selon, c’est un peu
        comme la baguette, toute fraîche alors qu’elle vient de sortir
        du four… je m’égare) que personne ne viendra réclamer. Je le
        sais parce que je me suis rencardé sur son blase et rien de
        bien folichon. Il a navigué dans les eaux troubles d’un trafic de
        poupées russes qui contenaient des diamants…

        Tout semble porter à croire qu’il avait magouillé entre diamant
        naturel et diamant industriel. Bête initiative de sa part. Enfin,
        ce n’est pas grave. J’ai au moins un indice. Il n’y a pas trente-
        six prothésistes sur le modèle jambe de bois. J’en connais un
        seul. Il est à son compte à l’extérieur d’un petit village.

        Voilà   que   je   suis   devant,   une   maisonnette   entre   lierre   et
        vieilles pierres. Il est minuit. Je n’ai pas traîné. Je sors mon
        fusil à canon scié. On ne sait jamais. L’endroit est propice à la
        mauvaise rencontre qui finit mal en général. Et j’aime pas être
        pris au dépourvu… même par une jambe de bois.

        Ma lampe est braquée sur la portée d’entrée et bien qu’avant
        j’ai   « sondé »   les   alentours,   cette   porte   d’entrée   est   d’un
        aspect louche avec des traces de balles et de sang. C’est pas
        bon signe. Quelques craquements, un sifflement étrange, un
        grésillement d’une radio… je pousse la porte… j’ai une sueur
        triomphale   et   un   cœur   toujours   loyal   à   ce   moment   précis
        quand une ombre passe devant moi en un clin d’œil que je fais
        deux pas sur le côté dans le vestibule d’entrée et me retrouve
        dans un placard à… balais. Un boucan à faire trembler les
        premières   tombes   du   Père   LaChaise,   me   laisse   dans   un
        moment de fraîcheur intense puis d’un brûlant désir de filer à
        la vitesse d’un TGV qui n’est pas en panne…

        Je respire trop vite pour réfléchir et me rendre compte de suite
        que j’ai le froid d’un canon genre fusil superposé IJ27 Baïkal
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