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DERNIERS MOTS DE NUDITÉ
J’ai eu toute l’énergie du partir et… je suis resté. Lâche,
dégonflé, couard, poltron, jean-foutre, faible… ? Il y a des
destins qui s’accomplissent dans l’ombre d’un tracé.
Au resté, je suis entre deux eaux et me couvre de réflexions et
questionnements qui me tiennent chauds comme un vêtement
en cachemire.
Je veux rester… mais je suis déjà enraciné, profondément,
foncièrement, pleinement dans ma terre azotée de moi
jusqu’aux tréfonds de mes fibres… frileuses.
Partir, le mot est savoureux, délicieux même… “partir, c’est
mourir un peu, mais mourir, c’est partir beaucoup” dit Allais
partir aussi pour de bon. Belle expression et même si je vis
pour mourir un peu chaque jour, je ne veux pas précipiter la
chose avec un partir qui m’angoisse entre l’intestin capricieux
pour un oui/non et d’un cerveau prêt à se guillotiner les
synapses pour un non/oui.
Il n’est grands soins qui s’accommodent de l’incertitude. Le
doute est mon ciment et en mourir de honte, à l’avouer en ces
lignes aux derniers trébuchements de ma voix parmi vous,
demain sera effacé avec l’espoir d’aujourd’hui pour un autre
demain avec un autre corps et des amants de tortures morales,
de supplices de lâche, d’interrogatoires absurdes entre moi et
moi, d’épreuves débités à la scie des tourments…
— Dites-moi, il a rendu gorge, là… ou il faut attendre qu’il soit
vraiment froid pour l’emporter ?