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Le cinéma colonial
Roy Armes
si nous devons aborder les questions de l'histoire et de la culture de la
nation, la forme particulière prise par l'intersection de l'histoire,
de la culture et de la politique contemporaines, qui est manifestement
une question cruciale pour les expériences récentes de la plupart des
populations du monde, nous devrions également considérer non pas ce
qu'est l' « identité »... mais comment les personnes et les groupes de
personnes réels, spécifiques, socialement et historiquement situés,
articulent eux-mêmes leurs conceptions de soi, leur expérience historique
et leur place dans la société.
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James McDouGal
l'Afrique du nord nous a donné de meilleurs vins que nous n'aurions pu
l'imaginer. Je ne vois aucune raison pour qu'elle ne nous donne pas, demain,
les meilleurs films français .
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L -Acteur français Harry Baur, 1937
e cinéma a atteint l'Afrique en même temps qu'il s'est répandu en Eu- rope et
aux Etats-Unis. Des séances de cinéma ont lieu au Caire et à Alexandrie dès 1896,
à Tunis et à Fès en 1897, à Dakar en 1900 et à Lagos en 1903. L'impulsion initiale
derrière cette diffusion mondiale était pure- ment commerciale: le désir d'exploiter au
maximum le potentiel commercial de ce que ses inventeurs, comme les frères
Lumière, craignaient de n'être qu'une nouveauté passagère. Mais à mesure que les
récits cinématogra- phiques gagnaient en longueur et en complexité, l'exportation des
films pre- nait une nouvelle signification. Comme l'a observé Férid Boughedir: « Le
cinéma est arrivé en Afrique avec le colonialisme. Son rôle principal était de fournir
une justification culturelle et idéologique à la domination poli- tique et à
l'exploitation économique ». A bien des égards, le cinéma a réussi à remplir ce rôle:
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« Un travailleur indigène est plus performant lorsqu'il croit que les représentants du
pouvoir colonial sont ses supérieurs en termes de race et que sa propre civilisation est
inférieure à celle des Blancs ». De petits films d'une minute ont également été
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tournés en Afrique au début du siècle, les opérateurs Lumière ayant pris l'habitude
de tourner des « vues » locales (un procédé relativement simple puisque le