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afin de cerner les Turcs incrédules. À l’aile gauche aussi chevauchait le très

               vaillant chevalier Raymond, Comte de Saint-Gilles. À l’aile droite étaient le duc
               Godefroi, puis le vaillant chevalier qu’était le Comte de Flandres et Hugue le

               Mainsné et plusieurs autres dont j’ignore les noms.
               À  l’approche  de  nos  chevaliers,  les  Turcs,  les  Arabes,  les  Sarrasins,  les
               Angulans  et  tous  les  peuples  barbares  s’enfuirent  à  travers  les  défilés  des
               montagnes et les plaines. Le nombre de Turcs, des Persans, des Pauliciens, des

               Sarrasins, des Angulans et autres païens s’élevait à 360 000, sans compter les
               Arabes, dont nul, si ce n’est Dieu, ne connaît le nombre. Ils s’enfuirent avec
               une vitesse extraordinaire jusqu’à leurs tentes, mais ils ne purent y demeurer

               longtemps.  Ils  reprirent  leur  fuite  et  nous  les  poursuivîmes  en  les  tuant
               pendant tout un jour ; et nous fîmes un butin considérable, de l’or, de l’argent,
               des  chevaux,  des  ânes,  des  chameaux,  des  brebis,  des  bœufs  et  beaucoup
               d’autres choses que nous ignorons. Si le Seigneur n’eût été avec nous dans

               cette bataille, s’il ne nous avait pas envoyé rapidement l’autre armée, aucun
               des nôtres n’eût échappé, car, de la troisième à la neuvième heure, le combat
               fut ininterrompu. Mais Dieu tout-puissant, pitoyable et miséricordieux, ne

               permit pas que ses chevaliers périssent ou tombassent entre les mains de leurs
               ennemis,  et  il  nous  envoya  ce  secours  en  toute  hâte.  Deux  chevaliers  des
               nôtres,  plein  d’honneur,  Godefroi  de  Monte-Scabioso  et  Guillaume,  fils  du

               Marquis, frère de Tancrède, et d’autres chevaliers et piétons dont j’ignore les
               noms trouvèrent ici la mort.
               Auteur de cette source historique

               La source évoquée précédemment est l’Anonyme des Gesta Francorum, un
               récit anonyme du début du XIIe siècle qui raconte les événements de la
               première croisade (1096-1099). Cet ouvrage est considéré comme l’une des
               sources les plus précieuses et les plus détaillées sur cette période de l’histoire.

               Elle a également la chance d’être rédigée contemporainement à la bataille, et
               donc de se vouloir être la plus précise possible.
               L’auteur de ce récit est inconnu, mais il est généralement admis qu’il était

               un chevalier qui a participé à la première croisade. Il pourrait être originaire                 RENA - Les Compagnons Forgerons
               d’Italie, selon le récit qu’il fait du voyage vers Jérusalem, mais aussi par la
               manière qu’il a de parler des chevaliers français. Le texte a été écrit en latin

               et est parfois appelé Gesta Francorum et aliorum Hierosolimitanorum, qui se
               traduit par « Les gestes des Francs et des autres pèlerins de Jérusalem ».


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