Page 68 - LES FLEURS DE MA MEMOIRE BIS
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Elle le trouvait extrêmement gentil par l'attention qu'il portait
sur moi et ma petite sœur, et il ne venait jamais les mains vides, il
avait toujours quelques friandises à nous offrir. Il avait bien organisé
sa mise en scène pendant un certain temps, afin de s'attirer la
confiance totale de mes parents, mais également celle des clients,
pour se fondre dans l’environnement habituel de notre bistrot de
quartier.
Comme maman était affairée au comptoir avec ses clients, et mon
père dans la bourloire, occupé avec les tournois des deux équipes
adverses totalement concentrées sur leur jeu, personne n'avait
remarqué cet étrange client, spectateur novice du jeu de bourles. Il
m'avait installée gentiment sur ses genoux, pour s'adonner en public
et en toute discrétion à ses attouchements et pulsions malsaines.
J'avais envie de crier, de m'échapper, mais j'avais honte et j'avais
peur de me faire gronder, me sentant fautive de ce genre de situation
que je ne connaissais pas. Je me sentais sale, humiliée, mais je restais
muette, totalement renfermée. Si j'en parlais à maman, me croirait-
elle, probablement penserait-elle que cela était le fruit de mon
imagination ? Un client si gentil et attentionné qui nous apportait
régulièrement des friandises ! Je passerai probablement pour une
mauvaise fille ? Alors je me taisais et il réitérait ses actes, jusqu'au
jour où il proposa à maman de m'emmener faire un tour en voiture.
J’ignore si maman lut la frayeur dans mon regard ou sur mon visage,
mais elle comprit ma détermination devant ce ferme refus de ma part
prétextant des devoirs à terminer et je m'échappais furtivement.
Maman n'en parla jamais, je pense qu'elle n'avait pas réalisé, ce
qui s'était passé à son insu, elle avait probablement pensé que ce
refus était du à cette nature introvertie et ma grande timidité.
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