Page 194 - La pratique spirituelle

S’il n’y a rien à faire, qu’est-ce qui différencie au fond une per- Peut-on pratiquer l’approche corporelle à un âge avancé, malgré
sonne dite « éveillée » d’une autre ?
La perspective.
Parfois, l’accueil est là, tout simplement. Parfois non, il y a
identification. Est-il alors néanmoins utile de se « replacer » à
l’arrière-plan, même s’il n’y a rien à faire pour être ce qu’on est
déjà ?
Il n’y a pas de choix. La vérité s’impose d’elle-même. Elle
ne peut être choisie. C’est elle qui vous choisit.
Même ce « placement », qui semble délibéré, n’a pas l’air d’être
de notre ressort, mais de celui de la vie.
Oui, en effet. Toute velléité de localisation éloigne de la
globalité.
De quelle prise de conscience cette nouvelle perspective prend-
elle naissance ?
Le désir de globalité vient de la globalité elle-même.
Conseilleriez-vous quelque chose par rapport aux phases d’iden-
tification encore présentes, ou cela ne ferait-il que créer une ten-
sion supplémentaire ?
Les voir, à partir d’une vision lucide, sans compromis et
sans complicité.
Ces moments où observateur et observé ne font qu’un vont-ils
prendre de plus en plus de place ?
Par obligation, oui. Lorsque l’imposteur a été démasqué, il
n’est plus possible de lui accorder crédit. Il finit alors par s’en
aller de lui-même.
* teur vers ce qui en est conscient. Lorsque la perspective est
* *
194
de sérieuses limitations physiques (scoliose, genoux douloureux,
articulations rigides) ?
Absolument. Le yoga est un art de l’écoute. Il est un pré-
texte à l’éveil de l’écoute pure, libérée des contingences de
l’écouté. Que le corps soit souple ou rigide ne change rien à
la nature de ce que vous êtes. Accueillez, dans votre écoute, le
corps tel qu’il est, sans lui surimposer un schéma de ce qu’il
devrait être. La sensation est alors vibration. La vibration
résonne dans le silence. Le silence est, dans sa liberté première.
Peut-on dépasser ces limites grâce à l’utilisation du corps subtil ?
Toutes les postures corporelles peuvent, en effet, être
accomplies avec le corps subtil, sans intervention du corps
physique, qui reste alors immobile. Ces déplacements du corps
subtil ont un impact sur le corps physique, car le corps subtil
est le maître caché du corps physique.
Dans les approches corporelles, y a-t-il une logique dans le
déroulement d’une séance ?
Ces approches corporelles sont guidées par le ressenti et
l’écoute, ce qui n’exclut pas une part de technicité et un res-
pect de la tradition du yoga. L’accent, toutefois, est mis ici sur
la conscience globale, qui contient le corps et ses mouvements.
La posture corporelle est donc utilisée comme un pointeur
vers la conscience qui lui sert de support. La performance est
exclue de ces approches, car elle maintient une intention qui
masque la liberté d’être.
Peut-on « inventer » au gré du jour le déroulement d’une séance,
ou pouvons-nous prendre comme appui les enregistrements ?
Les sessions enregistrées sont une invitation à orienter l’at-
tention vers elle-même, et à utiliser le corps comme un poin-
comprise, l’intuition est alors libérée et peut prendre en charge
195