Page 228 - Desastre Toxicomanie
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Le désastre des toxicomanies en France                                                                                                 Actions pédagogiques



                   Je mettrais  d’abord en avant  les tentations  auxquelles  j’ai
                 été  soumis,  dans une  époque  où les  sollicitations  concernaient
                 essentiellement  le tabac et l’alcool.  Je n’ai pas manqué d’y
                 succomber  ;  me  laissant  littéralement  happer  par  ce  tabac.  La
                 dépendance  tyrannique à laquelle  il me soumit, m’a permis de
                 réaliser ce qu’il adviendrait si j’établissais le même type de relation
                 avec l’alcool, dont je voyais en permanence autour de moi, les
                 catastrophes  ambulantes  et  titubantes  qu’il  recrutait. Je mesure
                 toute ma chance d’avoir eu une famille  aimante,  exemplaire,
                 ouverte,  non castratrice,  laissant  une large place  au dialogue,
                 attentive,  m’attachant  certes à une chaîne,  mais assez longue
                 pour n’en pas ressentir une gêne qui aurait suscité ma rébellion.
                 Cette  éducation  a  su me  prémunir  des salopards  qui  voulaient
                 me faire partager leurs miasmes. Si la réussite se vit très bien
                 seul, le marasme a besoin d’être partagé ; il agrège beaucoup de
                 copains d’infortune. J’ai eu la chance d’avoir de très bons copains
                 d’enfance,  sains  d’esprit,  malgré  l’adversité  dont  quelques-uns
                 pâtissaient (père alcoolique pour l’un, alcoolo-dépendant pour un
                 autre, mais des mères qu’on qualifiait alors de « saintes femmes ») ;
                 des copains économiquement pauvres que leurs efforts ont hissés
                 dans l’échelle sociale, à des niveaux différents, pour y mener très
                 honnêtement des carrières dont chacun d’eux a pu être fiers.
                   Dans  une  société  où  le  profit  constitue  la  force  motrice
                 principale, à cette question : « Qu’est-ce qui vous faire courir ? »
                 je m’amuse à répondre, en riant pour dissiper les ambiguïtés :
                 « C’est évidemment pour vendre les livres où j’aborde ces prob-
                 lèmes ». J’espère qu’ils savent, ces « rapetous », qu’hormis de très
                 rares best-sellers (que je n’ai jamais imaginés) la rédaction d’un
                 livre est bien plus chronophage que rémunératrice. Je fais aussi
                 parfois cette autre réponse : « Désormais à la retraite, je m’emploie
                 à ce que la jeune génération, demeure dans un état de santé mentale
                 et physique qui lui permette d’assurer le versement de ma pension
                 de retraite ».
                   Sérieusement maintenant, comment un médecin ne serait-il, par
                 destination, préoccupé par la santé d’autrui ? Dès lors, comment
                 pourrait-il négliger ces causes majeures de morts et de maladies
                 évitables que sont les drogues ? Comment un enseignant, dévoué


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