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Existe-t-il d’autres moments dans le Pentateuque où semble
la contradiction apparente est donc résolue. d.ieu
36.
d.ieu, Moïse et le pire scénario possible
L’ExodE à côté duquEL vous avEz faiLLi passEr 36 Voir Rachbam sur le verset Exode 3:19 pour une explication similaire. se reproduire une dynamique similaire ? Existe-t-il d’autres d’Abraham Un cas venant corroborer cette théorie : la sombre prophétie craindre. la capacité d’
[véritable] aîné. À la place, c’est le fils aîné de inappropriées dans une partie de texte légal qui, en général,
l’épouse haïe qu’il doit reconnaître pour lui est constitué d’une prose très directe.
attribuer une part double dans tout ce qui est Ces curiosités peuvent vous paraître sans grande
trouvé pour lui ; car [c’est lui qui] est le premier importance. Quelle signification impérissable peuvent bien
de sa force, à lui revient le droit d’aînesse. révéler ces observations tatillonnes ? Posons-nous donc la
(Deutéronome 21:16-17)
question suivante : où avons-nous déjà rencontré de telles
Plusieurs éléments semblent inhabituels dans ce expressions auparavant ? Relisons encore une fois ce texte,
paragraphe : avec un regard attentif sur ces curiosités de langage nous
remémorant des actes du passé :
il doit reconnaître : cette expression paraît superflue et
confère au texte un aspect quelque peu guindé. La Torah aurait
pu simplement avoir dit : il doit lui donner une part double… L’homme ayant deux épouses
car c’est à lui que revient le droit d’aînesse. Qu’apporte la
torah de nouveau avec son « il doit reconnaître pour lui Le texte débute avec la description d’un homme ayant
attribuer » ? épousé deux femmes, une aimée et une autre haïe. Nous
trouvons le mot « haïe » – senoua (האָ וּׂנשְ ) – agressif,
Dans tout ce qui est trouvé pour lui : la torah semble inutilement cruel. Mais la grande dureté même de ce terme
affirmer que le père doit donner à son fils aîné une part est justement ce qui attire notre attention, nous forçant ainsi à
supplémentaire de ses biens. N’aurait-il donc pas été plus nous demander : où avons-nous déjà vu ce terme auparavant ?
clair de dire : … lui attribuer une part double dans tout ce avons-nous déjà rencontré une personne en particulier décrite
qu’il possède. Pourquoi mentionner : « lui attribuer une part de cette manière dans la Torah ?
double dans tout ce qui est trouvé pour lui » ? Que signifie ce
« trouvé pour lui » ? la réponse est oui, une seule autre personne dans la torah
est décrite comme senoua : léa.
Le premier de sa force : l’expression en hébreu est réchit
ono (ֹוֹנא תישִ ׁארֵ), une expression poétique dont la signification ל ֵח ָר ְו הּ ָמ ְח ַר־ת ֶא ח ַתּ ְפ ִיּ ַו ה ָא ֵל ה ָאוּנׂ ְש־י ִכּ ה ָוה ְי א ְר ַיּ ַו
exacte n’apparaît pas immédiatement. La traduction de Rachi ׃ה ָר ָק ֲע
(genèse 49:2), sur laquelle je m’appuie ici, part de l’idée que
ces mots signifient « le premier de sa force », en se fondant Et D.ieu vit que Léa était haïe, et Il ouvrit sa
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sur des comparaisons avec des versets des textes prophétiques matrice. (genèse 29:31)
plus tardifs d’osée (12:9) et d’Isaïe (40:26, 29). Il s’agit d’une
expression rare et obscure, et ses nuances poétiques semblent 41 Il paraît, sans nul doute, assez sévère d’évoquer les sentiments de Jacob
envers Léa en des termes si perturbants. L’expression ne signifie, en
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